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par Renaud Chantraine

Furie > La Fièvre des Archives 2
« Historiciser l’urgence » :
mise au point sur le projet de Centre d’Archives LGBTQI+ à Paris


A l’occasion des Ateliers-Débats pour la création d’un Centre d’Archives LGBTQI
ayant eu lieu à Paris [ au Carreau du Temple ] les 4 et 5 mai [ 2018 ],
nous publions les interventions et tribunes de plusieurs participant·es à ces journées,
parmi lesquel·: les Sam Bourcier, Renaud Chantraine [ ... ]

Cherchant à reconstituer à partir du peu de sources disponibles (toujours ça !) l’historique du projet serpentin de Centre d’Archives LGBTQI+ à Paris, j’ai fait la découverte que dans un certain nombre de discours, qui remontent pour certains à des décennies, la thématique de l’« urgence », associée à celle de la mémoire LGBTQI+, était très fréquemment mobilisée. [ ... ]

Première rencontre, les années 1980

Sur un bulletin d’adhésion à la Fondation Mémoire des Homosexualités, daté de 1985, on peut lire au premier paragraphe : « Contre la fragilité d’une Mémoire. Le développement récent des savoirs sur la sexualité (…) se heurtent toujours à l’obstacle majeur des sources documentaires, notamment les plus liées au quotidien et à l’intimité. Plus que tout autre, la trace laissée par les homosexuels et les lesbiennes est fragile, vouée à une disparition rapide. (…) Combien de témoignages précieux (…) ont été ainsi confisqués, détruits ou simplement perdus et dispersés ? (…) Perte sèche au bilan de l’histoire, il est temps de mettre fin à cette hémorragie culturelle. »
Urgence de la métaphore : stopper l’hémorragie, urgence à sauver les traces de la disparition. C’était la mission que se donnait cette association, fondée à Paris en février 84, l’une des toutes premières en France à s’intéresser à la préservation des mémoires – « dans le vocabulaire de l’époque » – gaies et lesbiennes. Déjà émergeait, il y a plus de trente ans, le projet d’un Centre visant à rassembler les témoignages liés à des sexualités minoritaires – archives et objets – en vue de les conserver et les valoriser.

La rupture de l’arrivée du sida

Malgré ses ambitions, le projet ne parvient pas à mobiliser, étant rapidement « submergé par la vague du sida » comme le raconte l’un des co-fondateurs, Christian De Leusse. Seul de ceux-ci survivant de cette époque, il créera ensuite à Marseille en 89 une association héritière de cette première lancée, Mémoire des Sexualités, qui cherche aujourd’hui à se réinventer. De leur côté, les lesbiennes féministes créaient, dès 84 les Archives Recherches et Cultures Lesbiennes.
Pour la communauté gaie, le sida est une rupture et une épreuve de fonds. A partir du milieu des années 80, pratiquement toute l’énergie militante passe dans une lutte désespérée contre l’épidémie et ses complices. [ ... ]

Les conséquences des nouveaux traitements sur la mémoire

A partir de 1996, l’arrivée des trithérapies marque un changement majeur dans l’histoire de l’épidémie, au moins dans un premier temps dans les pays du Nord. Cette nouvelle rupture semble bouleverser profondément le rapport qu’entretiennent certains acteurs de la lutte contre le sida à la question du temps, à la gestion de l’urgence comme à la manière dont l’avenir est nouvellement envisagé, mais aussi le passé. [ ... ]
Côté institutions, le Musée des Arts et Traditions Populaires, ancêtre du Mucem, s’engage à partir de 2002 dans une vaste opération d’ethnographie d’urgence ayant notamment permit de sauver de la perte et la destruction une petite partie de la fragile mémoire associative.
De leur côté, les Archives Nationales commencent à cette même époque à recevoir en dépôt les archives de l’association AIDeS. Beaucoup plus tard, en 2014, c’est celles d’Act Up-Paris qui rejoignent les collections nationales. La situation de l’association est alors critique. Elle connaît de grandes difficultés financières, suite à la diminution progressive des subventions publiques et des dons, ainsi que la baisse du nombre de militants. L’urgence apparaît à nouveau et va la conduire à devoir quitter en toute hâte les espaces historiques occupés depuis 89. Que faire de la mémoire de l’association, de tous les objets et archives rassemblés dans leurs locaux ? L’absence de Centre d’Archives LGBT à Paris, qui aurait pu recueillir archives ET objets de l’association en péril, se fait cruellement sentir[5]. La solution finalement trouvée consistera à placer les premières au sein des Archives Nationales et à déménager les secondes au Mucem à Marseille. Malheureuse séparation, formalisme institutionnel, violence des archontes.

2001 : Académie Gay et Lesbienne et projet de CADHP

Retour en arrière, 2001, 1er mars : création de l’Académie Gay et Lesbienne à Vitry. Phan Bigotte a raconté publiquement plusieurs fois son parcours, quelques repères :
    ¤   Réfugié politique du sud Vietnam, il a vingt ans quand il arrive en France en 1975 et découvre un nouveau monde homo qui le fascine, [ la revue et les réunions de ] Arcadie, le [ journal du ] FHAR, les premières manifestations du CUARH, etc. Il commence à collectionner tous les documents qui lui passent sous la main. Depuis ce temps, il raconte qu’on l’appelle « Garde Tout ». C’est un gardien.
    ¤   En 89, il découvre sa séropositivité, revend la librairie où il travaillait pour acheter un pavillon en banlieue, afin d’accueillir dans de meilleures conditions sa collection qui, au fil des années, devient de plus en plus volumineuse. Il rejoint Act Up [ Paris ] puis AIDES, dont il a conservé de très nombreux documents, notamment internes. Lui aussi explique que pendant ces années terribles, il a assisté impuissant « à la disparition prématurée, corps et biens, de très nombreux homosexuels. »

Souvent, les familles jetaient tout, cherchant à se débarrasser de la sexualité et de la maladie « infamantes » de leur parent, violence de l’effacement. Lorsqu’à partir de 96, de nombreuses associations mettent la clé sous la porte, les bennes à ordures se remplissent d’archives et c’est toute une part de l’histoire qui disparaît.

Pour Phan Bigotte, l’urgence, c’est « sauver la mémoire des poubelles ». Urgence d’un geste obsessionnel du collectionneur presque solitaire qui se déploie dans la durée, constance du jardinier. Sans lui, que resterait-il de ce passé collectif ? L’Académie [ Gay et Lesbienne ] est sans doute une des plus grosses collections d’Europe, elle croule sous le nombre ; ses demandes sans cesse répétées d’un local pour pouvoir les rendre accessibles au public ont perpétuellement été refusées…


Sam Bourcier retrace dans un chapitre du deuxième volume de Queer Zones le lancement du 1er projet de Centre d’Archives LGBT à Paris [ Centre d'Archives et de Documentation Homosexuelles de Paris (CADHP) ] par Bertrand Delanoë ; le point de vue est situé, mais si précieux tant il est difficile de trouver des sources pour comprendre rétrospectivement cette période, et tant la propre mémoire de la Mairie de Paris semble faire défaut sur cette affaire…. L’urgence ici se mêle aux – pluriel – politiques. [ ... ]

Plusieurs collectifs (Archilesb, Vigitrans, Lopattaq puis ArchiQ) se montent dans une autre forme d’urgence – le scandale et la mobilisation, fertile et constructive, contre un projet injuste et mal embarqué ; ils protestent contre : la sous-représentation des lesbiennes et des trans, le manque de transparence et de communication, l’absence de concertation et de dialogue, l’occultation des archives sur le sida et la prostitution, le déni des initiatives existantes comme l’Académie Gay et Lesbienne, les ARCL ou le Centre de Documentation [ Centre d'Archives et de Documentation Gay Kitsch Camp ] monté à Lille par Patrick Cardon et enfin, last but not least, une conception de l’archive verticale et excluante.

Urgence à repenser un modèle de l’archive qui tienne compte de la spécificité de nos communautés et de nos mémoires.
    ¤   Mars 2004 devait être la date de l’ouverture du Centre [ d'Archives et de Documentation Homosexuelles de Paris (CADHP) ] ; au printemps toujours rien, deux années et 100.000 euros de perdus ; une promesse qui s’éloigne. Un local de 40 m2 avait même été attribué à ce projet, rue Notre Dame de Nazareth, mais celui-ci ne pouvait ni recevoir d’archives ni être ouvert au public ! L’histoire se répèterait presque.
    ¤   2007, le projet réapparait sous le nouveau nom d’Institut Arc-en-Ciel confié cette fois à Louis-Georges Tin – lui-même pris dans toutes sortes d’autres urgences.
    ¤   Six ans plus tard, à l’EuroPride de 2013 à Marseille, lors d’un Débat sur les archives et les centres de documentation LGBT, le rêve d’un Centre d’Archives LGBT à Paris vole à nouveau en éclats : Louis-Georges Tin est pris à partie et les reproches fusent : le projet est au point mort depuis trop longtemps, les réunions n’ont plus lieu, sa gestion et son pilotage ne sont manifestement plus assurés, la confiance dans la dimension collective du projet s’érode. Remarquable litanie d’espoirs, de sursauts et de points morts.
    ¤   En décembre 2014, renversement de situation : le groupe EELV relance l’initiative abandonnée en déposant un vœu au Conseil de Paris portant sur la reconnaissance de la mémoire LGBT et la création d’un centre d’archives. [ ... ]

Il faudra péniblement attendre un an et demi pour qu’au mois de juin 2016, une première réunion soit convoquée par la Mairie [ de Paris ] , ouverte à un certain nombre d’associations intéressées par ces questions – Centre Audiovisuel Simone de Beauvoir, Centre LGBT, Académie Gay et Lesbienne, Fières, ou Act Up [ Paris ] notamment.
    ¤   D’emblée, et ce malgré le lourd passif d’erreurs déjà commises et de fortes attentes, une série de maladresses et de qui-pro-quo sont commises côté Mairie.
    ¤   Absence de clarté quant au rôle confié aux associations convoquées dans le cadre d’une réflexion qui se revendique collective, qui renvoie plus généralement à la question de « qui pilote et construit le projet ».
    ¤   Absence de transparence sur le budget qui était sensé être alloué aux travaux de préparation d’un projet intégrant la spécificité de ce type de matériaux d’archives, de ces mémoires fragiles et minoritaires, et qui a en fait servi à payer une fortune les services de Res-Publica, société de concertation pour cas « difficiles », au prétexte que les associations, pourtant relativement unies et prêtes à avancer, auraient été incapables de s’entendre (je parle de celles véritablement intéressées par les enjeux d’un tel centre, qui agissent pas en dehors d’hallucinantes magouilles politiciennes).
    ¤   Sans insister sur la décision sans concertation d’attribuer au Centre LGBT [ de Paris IdF ] la gestion d’un box de dépôt et de stockage d’urgence (sic) d’archives en péril, aux contours flous, là encore non-accessible au public.

Le temps passe, rien ne se passe, piétinements.
    ¤   Le ton monte d’un cran fin mai 2017, à l’occasion d’une tribune de Didier Lestrade dans Libération, réagissant au Prix décerné au film 120 Battements Par Minutes à Cannes :
« Si tout le monde parle de transmission de l’activisme, où en sommes-nous du projet d’Archives LGBT que la Mairie de Paris promet depuis presque deux décennies et qui reste au point mort? ? Mes propres archives du début d’Act Up, je les lègue à qui ?? Faudrait-il manifester devant l’Hôtel de Ville pour obtenir enfin un Centre de Documentation comme d’autres villes européennes en disposent? ? »
    ¤   L’ancien président d’Act Up-Paris persiste et signe quelques mois plus tard lorsqu’il interpelle la Maire [ de Paris ] à la fin de l’été pour connaitre ses intentions réelles sur le projet du Centre d’Archives. Celle-ci renvoie la balle à l’Etat en déclarant que le projet doit être « porté à l’échelle nationale, car l’histoire du mouvement LGBT concerne la France entière ». Drôle de manière de se dégager d’une promesse faite au nom de la Mairie de Paris, et d’écraser par la même occasion toutes les initiatives qui existent en régions, de Lyon à Toulouse, en passant par Marseille ou Rennes.
    ¤   Le 8 septembre, Lestrade lance un compte à rebours sur Slate : « Si ce Centre d’Archives n’est pas ouvert avant ma mort, ce sera Anne Hidalgo et Bertrand Delanoë qui se partageront mes cendres sur leurs têtes. Le compte à rebours commence maintenant. »

Nous en sommes à peu près là, sauf qu’entre-temps la prise de conscience de l’importance d’un tel outil pour nos communautés s’est développée, au sein des associations mais aussi à d’autres endroits, multiples, où sont les personnes qui se sentent concernées : activistes et archivistes, chercheur.es, journalistes, fonctionnaires, jeunes ou moins jeunes, ou tout simplement passionné.es.
Le Collectif que nous avons constitué en septembre dernier agrège ces différents points de vue, qui sont politiques, culturels, scientifiques, sociaux, patrimoniaux ; il les fait dialoguer, se croiser, se questionner et produit une expertise sur tous les sujets qui concernent le futur Centre, lors de réunions à la Bourse du Travail qui ont lieu tous les 15 jours, ouvertes à toutes et à tous. Cette journée du 5 mai, ainsi qu’une liste de 12 priorités, ont été construites collectivement par le Collectif Archives LGBTQI, avec sérieux et transparence, pour esquisser les contours d’un centre d’archives, d’exposition, de recherche, de documentation et de mémoire, ambitieux et à même de rassembler et faire vivre fièrement les mémoires de nos communautés.
URGENCE = ACTION


[ Lire aussi → L'Historique du Conservatoire des Archives et des Mémoires LGBT ]
[ au Format PDF (460 Ko) ]

 

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Couverture de Fugues n° 1 - volume 35 Article de Fugues n° 1 volume 35 : page 106 Article de Fugues n° 1 volume 35 : page 107 Avril 2018

mensuel Fugues
Volume 35 - N° 1
pages 106 et 107

par Denis-Daniel Boullé

[ → Format > PDF (1,68 Mo) ]

Bien vivre VIH > Témoignages
PORTRAITS DE VI(H)ES :
touchant, émouvant, à lire assurément

Elles et ils s’appellent Didier, Élodie, Nils, Hoàng, Morgane, Giovanna, Rémy, Florence, Julien, Ida, Nicolas, Pascal, Charlotte. Elles et ils ont entre 23 et 65 ans, des parcours de vie différents, et partagent tous le fardeau de vivre avec le VIH. Parfois depuis quelques années, parfois depuis plus de trente ans.
Avec courage, elles et ils se livrent, avec justesse, avec émotion mais sans jamais tomber dans le pathos, sous la plume de la journaliste Doan Bui.

À l’initiative de Jean-Luc Roméro-Michel, Président d’Élus Locaux Contre le Sida (ELCS), bien connu ici pour ses nombreuses visites au Québec, ces témoignages illustrent combien les personnes séropositives doivent composer avec une société qui peut encore les stigmatiser, les ostraciser. Un double combat pour elles, celui de la maladie, bien entendu, celui de leur pleine reconnaissance dans la société.

Que ce soit Nils, 26 ans, séropositif depuis sa naissance,
    ¤     de Fred 65 ans qui se considère comme un « putain de survivor » (nous sommes en France - ndlr),
    ¤     ou de Giovanna, transgenre et prostituée sans papier après avoir quitté sa Colombie natale,
    ¤     ou Hoàng, vietnamien réfugié qui collectionne tout ce qui touche nos communautés à travers son association crée en 2001, l’Académie Gay et Lesbienne  [ Lire → L'Historique du Conservatoire des Archives et des Mémoires LGBT (Format PDF : 460 Ko) ]
    ¤     ou enfin, la comédienne Charlotte Valendrey, bien connue en France pour ses rôles dans un grand nombre de téléséries.

On se retrouve dans la vraie vie, loin des chiffres et des statistiques. Des êtres de chair et de sang qui, sans flafla, témoignent, racontent leur labyrinthe émotionnel en lien avec le VIH.

De leur prise de conscience jusqu’à leur adaptation avec la maladie et le plus souvent dans un environnement méfiant, parfois hostile, marqué par la peur et par le jugement. Un contexte qui favorise alors la marginalisation de certains d’entre eux.

Elles et ils deviennent des héros malgré eux – on sait qu’elles et ils se seraient passé.es d’une telle épithète – et qui malgré les avatars de la vie continuent de croire en la vie.

UNE ÉMOTION CONTENUE

À lire absolument, car Doan Bui ne tombe jamais dans le pathos. Et c’est peut-être la force de ces portraits où l’émotion contenue en devient plus forte pour le lecteur.

Jean-Luc Roméro-Michel qui signe la préface, rappelle la genèse de ce livre, et fait référence à d’autres portraits de séropositifs publiés antérieurement.

En postface, deux entrevues avec deux médecins :
    ¤     Valérie Pourcher médecin à la Pitié-Salpêtrière,
    ¤     et Willy Rozembaum, qu’on ne présente plus, et qui depuis plus de 35 ans combat le VIH-Sida.

De plus en plus rares sont les opportunités de nous rappeler que nous n’en avons pas fini avec le sida, même si beaucoup restent engagés comme aux premiers heures de l’épidémie.
Rares sont les occasions données aux personnes séropositives de parler de ce qu’elles ont vécu et de ce qu’elles vivent aujourd’hui.
" Portrait de ViHes " vient combler ce manque.

PORTRAITS DE VI(H)ES
Jean-Luc Roméro-Michel, Doan Bull et Patrick Messima,
Éditions du Cherche Midi 2017.
Disponible dans certains librairies au Québec ou par Amazon.


[ → Lire le texte sur Hoàng Phan Bigotte dans le livre « PORTRAITS DE VI(H)ES » ]
[ au Format PDF (687 Ko) ]

 

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logo du site nouvelobs.com 1er décembre 2017

site nouvelobs.com
par Doan Bui
et Patrick Messina

Santé
Cinq survivants du VIH racontent...


« Ce qui me tue le plus, ce n’est pas la maladie »

C’est quoi être séropositif en 2017 ? C’est encore, hélas, vivre caché. Si la médecine a progressé, le tabou sur le sida reste une prison.

Morgane, Yannick, Nils et d’autres… ont décidé de briser le silence. Ils se sont confiés dans un livre « PORTRAITS DE VI(H)ES » qui paraît à l’occasion de la Journée mondiale contre le sida [ le 1er décembre 2017 ], acceptant de se livrer pour la première fois à visage découvert.   [ ... ]

Ces textes et images sont extraits du livre « PORTRAITS DE VI(H)ES »,
publié au Cherche Midi (textes de Doan Bui, photos de Patrick Messina).

Insufflé par Jean-Luc Romero-Michel, président de l’association Élus Locaux Contre le Sida (ELCS) et seul homme politique à avoir révélé sa séropositivité, ce projet regroupe quinze portraits d’hommes et de femmes touchés par le VIH.

Il fera l’objet d’une exposition itinérante en France. »   [ Voir → Le programme de l'exposition itinérante des « PORTRAITS DE VI(H)ES » ]

[ ... ]

« On m'appelle " Hoàng Garde-tout " »

Hoàng Phan Bigotte, 62 ans, séropositif depuis ses 32 ans


Il y a des sacs plastique partout. Des cartons. Des étagères qui débordent, des tiroirs remplis jusqu’à la gueule, des valises, des malles.
Il est envahi, Hoàng, tellement envahi qu’il n’ose nous faire rentrer dans son pavillon de Vitry-sur-Seine. « C’est devenu plus du tout circulable. »

Cela fait des années que Hoàng, 62 ans, s’est attelé à ce travail titanesque, celui de rassembler les bribes de la mémoire gay, tout seul d’abord, puis aidé par Thomas Leduc, un documentaliste professionnel. Thomas, qui depuis n’a plus quitté sa route.

Des années, des dizaines d’années, qu’il accumule, qu’ils accumulent ensemble, sans relâche. « On m’appelle “ Hoàng-Garde-tout ”. »

Tout ça a commencé dans les années 1990, au plus fort de l'hécatombe. Quand il a commencé à voir dans la rue, jetées à côté des encombrants, les affaires personnelles des morts du sida.
« Près des Halles, je me souviens de ces appartements vidés après un décès, le tout partait aux ordures, déposé sur le trottoir. Les clochards venaient fouiller, pour récupérer des trucs. J’en voyais parfois qui revendaient des choses, à côté d’un bric-à-brac ébréché, des robots Moulinex cassés, des vieilles chaussures. J’ai même reconnu des photos intimes des gens que j’avais croisés, connus. Les voir étalés ainsi par terre à la vue des passants comme ça, c’était horrible. C’est comme si on les avait tués une deuxième fois. »

C’est insupportable pour Hoàng, de ne rien faire pour préserver ce passé qui se perd et s’efface. Peut-être parce que lui l’exilé, qui a fui le Vietnam le 30 avril 1975, le jour même de la chute de Saïgon, a été contraint de tout laisser derrière, la maison familiale des jours heureux, les souvenirs, les photos, les amis. Hoàng n’est jamais retourné au Vietnam. « Enfin, si. Avant, je retournais le soir voir ma maison sur Google Maps. Mais maintenant, ils ont construit une tour, on ne reconnaît plus rien. Je n’y vais plus. »

Il pensait qu’avec sa nouvelle vie en France, c’en était fini de cette litanie de deuils.
« J’ai dû ensuite compter un à un tous les copains de France, emportés par le vent du sida. »

En 1987, Hoàng apprend qu’il est séropositif. « Je n’avais plus que 250 T4 [ les T4 sont les lymphocytes auxquels s’attaque le VIH (NDLR) ]. J’étais persuadé que j’allais bientôt mourir. » Il devient militant à AIDeS et à Act Up [ Paris ].
« Je me souviendrai toujours des bénévoles [ du Groupe Loisirs ] chez AIDeS, qui s’occupaient des malades. On fêtait les anniversaires : beaucoup des malades étaient terriblement seuls, abandonnés par leur famille et leurs amis. Même morts, ils faisaient encore peur : j’ai vu des proches jeter les affaires de malades avec des gants en plastique, de peur d’être contaminés. »

Autour de lui, la Faucheuse fauche, avec ardeur. Les enterrements d’amis se succèdent. Hoàng commence à être tracassé par cette mémoire qui se perd.
« À Aides, on me disait, oui, génial, mais rien ne se passait. Act Up, au moins, ils ont été francs. Cleews Vellay, qui était président à l’époque, me disait : “ Arrête de nous bassiner avec ton culte des morts ! ” Il est mort peu après. Si jeune. C’est lui dont les cendres ont été dispersées sur des assureurs, par Act Up ! Pour le dixième anniversaire de sa mort, Philippe Labbey, son compagnon, nous a légué ses archives personnelles, on a tout mis en ligne. Aujourd’hui, ça a une vraie valeur historique. Mais c’est vrai, à l’époque, on ne pensait pas à ça. L’urgence n’était pas là, à ce moment, avec l’épidémie, et les gens qui tombaient comme des mouches. »   [ Voir → Le Fonds d'archives « Cleews Vellay - Philippe Labbey » déposé au Conservatoire des Archives et des Mémoires LGBT de l'Académie Gay & Lesbienne ]

Hoàng décline lui aussi, attaqué par la maladie. « Vivre avec le VIH, c’était comme continuer de descendre les marches d'un escalier. Tu descends, tu crois avoir atteint le fond, mais non. » Il a des zonas à répétition.
Vient le début des trithérapies, mais pour lui, ça ne marche pas. Il descend à une vingtaine de T4. Là, Hoàng voit la mort en face. Il s’y est préparé : pour Aides, il accompagne des mourants du sida. « Quand je les voyais, lors de leurs derniers instants, je me disais : “ Ah oui, ça va se passer comme ça pour moi. ” »

Jusqu’à ce jour où le médecin qui le suit décide de lui administrer une dose de cheval, supérieure à son poids. « Quand on a eu le résultat du bilan sanguin, il m’a dit : “ Ce soir, tu vas acheter une bouteille de champagne. ” J’étais remonté à 50 T4 ! Un miracle ! Tout le monde dans le service était euphorique… Mais ailleurs, si on toquait à d’autres portes, y en avait qui mouraient toujours. Ceux qui agonisaient en silence. »

Hoàng, lui, va passer du côté des rescapés. C’est le moment où tant de militants vont réaliser qu’ils vont vivre, finalement, qu’ils ont brûlé toutes leurs économies, qui réalisent que maintenant qu’ils ont survécu au VIH, il va falloir survivre tout court.

Aujourd’hui, le combat têtu et obstiné contre la mort et l’oubli de Hoàng, c’est ce projet de Conservatoire des Archives et des Mémoires LGBT : Hoàng ne demande même pas de subvention, juste un local, un peu de place pour valoriser le fonds incroyable qu’il a accumulé au fil des ans.   [ Voir → L'Historique du Conservatoire des Archives et des Mémoires LGBT ( Format PDF : 460 Ko) ]

« J’ai survécu à la guerre du Vietnam, puis grâce aux hôpitaux français, je suis un rescapé du sida.
Depuis trente ans, chaque jour qui passe, c’est un bonus pour moi, mais je coûte très cher à la Sécu : j’aimerais bien être utile, à ma façon. Rendre un peu de ce que j’ai reçu.
»


[ → Lire le texte complet dans le livre « PORTRAITS DE VI(H)ES » ]
[ au Format PDF (687 Ko) ]

 

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mensuel   Wag Mag   Wag !

N° 143 > pages 14 - 15 - 16

par François Mobihan

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Focus   >   Revue de presse
L'importance de la Mémoire LGBT...
et de sa transmission

C'est un sujet qui nous tient à cœur à WAG, il est primordial pour la communauté LGBT et, plus le temps passe, plus l'urgence se fait sentir.

La France a besoin d'organiser la pérennisation de l'histoire de ses citoyens LGBT. C'est d'ailleurs peut-être ce qui fait peur aux pouvoirs publics dans l'aide qu'ils devraient nous apporter. Oui, cette idée semble aller à l'inverse du principe de République effaçant les communautés.

Pourtant, la communauté LGBT existe, et le souvenir de son histoire est en danger.


Le choc " 120 Battements Par Minute "

Avec la sortie du film " 120 Battements Par Minute " et son succès en salle, beaucoup, dans la jeune génération, découvrent soudainement avec choc l'histoire de la lutte contre l'épidémie de Sida en France et, par ricochet, l'histoire de leurs ainés.
Ces dernières semaines, de nombreux articles de presse sont revenus et ont réfléchi au sujet de la Mémoire Gay et de sa transmission.
Une histoire des LGBT français qui n'a toujours pas de lieu pour sanctuariser les documents qui retracent son parcours.

La réflexion de Vincent Daniel, journaliste trentenaire à France Info, sur son blog, est emblématique. Découvrant l'histoire d'Act Up-Paris dans le film, il s'interroge lui même : " Comment pouvais-je ignorer tout ça ? Ce film relate des faits qui ont moins de 30 ans... des actions qui se sont déroulées alors même que j'étais né. "
Dans un article paru dans l'Express, il précise : " C'est plus qu'un film, c'est une histoire qu'on doit faire vivre ". " Personne ne m'a appris l'histoire des luttes. Aujourd'hui, je dis facilement que Je suis pédé, sans que cela pose problème. Mais je me rends compte à présent qu'il y a trente ans, j'aurai été un marginal ou un fou de le faire, explique-t-it. J'ai pris conscience de ce que je dois à ma communauté. "
La réflexion très juste du journaliste sur son blog est à méditer : " Chez les LGBT, la transmission ne pourra se faire que par ta communauté (au sens noble du terme). Un june noir grandit dans une famille noire, il sera donc sensibilisé aux possibles discriminations et aux luttes qu'ont dû mener ces ancêtres. Rien de tout ça pour nous qui naissons dans des familles hétéros. Nous, on n'hérite pas d'une mémoire, il faut qu'on se l'approprie et c'est là que la communauté LGBT joue un rôle fondamental et vital. "


Un Centre d'Archives LGBT ?

À cette évocation, nombreux sont ceux qui parlent : " d'un vieux serpent de mer ".
Nous sommes en 2017, et ce Centre des Archives tant espéré n'est toujours qu'à l'état de projet.

Pourtant, dès 2001, son idée est déjà là via Jean Le Bitoux (fondateur du titre de presse Gai Pied fin des années 70). La Mairie de Paris va même voter et verser une subvention de 100.000 euros en 2002...
Quelques années plus tard, malgré l'argent, le centre n'existe pas et le projet s'enlise. Jean Le Bitoux est licencié, d'autres vont essayer de faire avancer le dossier, mais celui-ci semble empoisonné pour la Mairie de Paris.

Les années suivantes, on parlera notamment de l'Institut Arc-en-Ciel... Les rapports s'enchaÎnent... mais toujours rien.


La dispersion des documents

Pourtant les années passent et nous assistons à la dispersion des témoignages d'une époque.

Ces dernières semaines c'est Didier Lestrade (cofondateur d'Act-Up Paris) qui monte au front pour défendre le besoin urgent d'un Centre d'archivage de la Mémoire Gay.
Sur le site Slate.fr, il signe une tribune sans concession au titre digne de ses années Act Up : " S'il n'y a pas de Centre d'Archives LGBT / sida, Delanoë et Hidago se partageront mes cendres sur la tête. "
Il précise en évoquant les années sida post trithérapies : " Les médias, la culture génêrale, les universités ont délaissé avec soulagement le sujet. Pendant ce temps, les activistes ont jeté leurs archives, faute de pouvoir les adresser à une structure qui pourrait les sauver. Avec chaque décès, chaque démênagement, des milliers de cartons de documents source, de photos, de vidéos, d'affiches et de livres ont ainsi disparu et cette hémorragie historique se perpétue encore aujourd 'hui. "

Si Didier Lestrade attend un Centre d'archivage digne de ce nom pour léguer ses archives personnelles : " En tant que fondateur d'Act Up-Paris, je possède des documents qui datent du tout début de l'association, et même avant. Et je tiens absolument à ce que ces raretés soient disponibles dans un lieu qui saurait les protéger. "
D'autres tentent déjà de mettre à l'abris les pièces de témoignages dont ils disposent.
Ainsi Didier Lestrade ajoute que : " Dégoûté, Act Up-Paris a offert ses stocks aux Archives Nationales " et que " Le cinéaste Lionel Soukaz a offert ses milliers d'heures de films à la BNF. "

Sur L'Express, Gwen Fauchois, miltante et vice-présidente d'Act Up Paris dans les années 90 confirme la même idée : " On gardait les tracts, les magazines, les photos, tout ce qu'on pouvait " même si ces pièces sont aujourd'hui en sécurité, " Ce n'est pas assez. Pour le moment, la préservation ne dépend que de petites associations et d'initiatives personnelles. "
L'Express nous apprend également que "le MuCEM de Marseille, la Bibliothèque de Lyon et le Centre LGBT de Paris mettent à disposition des archives, Il n'existe pas de collection de taille à disposition du public dans la capitale. Il ya pourtant de quoi faire. "


L'Académie Gay & Lesbienne

L'Académie Gay et Lesbienne est une association créée en 2001 par Phan Bigotte, libraire et coIlectionneur.   [ Lire → L'Historique du Conservatoire des Archives et des Mémoires LGBT de l'Académie Gay & Lesbienne (Format PDF : 460 Ko) ]

Dans un portrait / lnterview (de 2014) sur le site archimag.com nous apprenons que, dés les années 90 : " il observe, impuissant, le démantèlement de collections d'ouvrages et de documents appartenant à des militants, morts du sida. "
L'article consacré à Phan Bigotte se poursuit ainsi : " Rien ne pouvait plus choquer ce libraire et collectionneur invétéré ayant même conservé l'ensemble des revues homosexuelles achetées après s'être réfugié en France en 1975, au lendemain de la chute de Saigon, au Vietnam.
Apprenant sa séropositivité au VIH, en 1989, il revend sa librairie et s'investit alors dans les associations Act Up-Paris et AIDeS. Il commence surtout à s'intéresser à la préservation de la mémoire de ce qu'on allait bientôt appeler les " LGBT " : Lesbiennes, Gays, Bisexuels et Transsexuels.

" Quand les premiers morts du sida ont eu lieu, on a partois vu les affaires de toute une vie jetées ou dispersées par les familles. Honteuses, elles ne souhaitaient surtout pas garder de traces de cet aspect de la personnalité des défunts, explique-t-il. Face au refus des responsables associatifs de prendre en main ce problème, j'ai décidé de le faire seul, quitte à ce que ce soit sans soutien. "

Aujourd'hui, près de trente ans d'archives s'accumulent dans le petit pavillon de Phan Bigotte, à Vitry-sur-Seine, en banlieue parisienne. Saturés, le rez-de-jardin et le premier étage sont exclusivement dédiés au slockage de plusieurs dizaines de milliers de documents, soigneusement classés, que conserve l'association Académie Gay et Lesbienne.
" Par son volume et sa diversité, cette collection d'Archives LGBT est sans doute la plus importante en France sur l'homosexualité, la bisexualité et la transidentité, ainsi que sur le genre, la sexualité et le sida. Il rassemble plus de : 1.800 titres de périodiques, 1.200 numéros de presse grand public et spécialisée, 3.000 ouvrages et un millier de documents audiovisuels (VHS et DVD). Plusieurs fonds d·archives de personnes, d'organisations et d'associations, ainsi que des collections diverses (guides, annuaires, brochures, matériel de prévention, documents événementiels... ) et des objets (autocollants, boîtes d'allumettes, emballages de préservatifs, pin's, teeshirts, etc.). "


Et maintenant, on fait quoi ?

Pour Didier Lestrade toujours sur Slate.fr : " Si la Mairie de Paris avait délégué la préparation de ce Centre d'Archives aux anciens d'Act Up, il serait aujourd'hui fonctionnel. Nous savons faire les choses. Pendant trois mois, Anne Hidalgo, prêtresse de la démocratie participative, n'a pas jugé nécessaire de répondre à cette tribune (parue dans Libération) qui la mettait directement en cause. Il a fallu que je l'interpelle à plusieurs occasions sur Twitter pour qu'elle réponde la semaine dernière avec une formule consensuelle sans engagement, rejetant comme toujours la faute à la région, à l'État. "
Il ajoute : " Nous en avons marre. Nous ne lâcherons pas j'affaire. Nous ne demandons pas un Centre immense avec des dorures au plafond. Nous avons besoin d'un local et il n'a pas besoin d'étre nécessairement dans le Marais où tout est décidément trop cher. On peut très bien aller dans le XIXe arrondissement où ailleurs. Ce Centre d'Archives doit être un lieu de travail qui nécessite une équipe restreinte mais passionnée. "

De son côté Phan Bigotte veut redonner ce qu'il a reçu de la France pour son traitement.
" Ces objets, je les ai sauvé de la benne à ordures. Je ne demande pas de subventions, seulement un local. "
  [ Voir → La Pétition de l'association Académie Gay et Lesbienne : Demande d'un local parisien pour mettre les archives LGBT à disposition du public ]

Gwen Fauchois dans L'Express est “ en colère contre la Mairie de Paris, contre le Ministère de la Culture et celui de la Santé. La Municipalité pourrait engagé quelqu'un pour scanner ces documents. Ce serait déjà une vraie voie d'accès vers la mémoire, accessible à tous. " Capitale de l'Hécatombe des malades du sida, la Ville " fuit sa responsabilité " dénonce la militante.

Côté institutionnel, sur www.paris.fr. on peut lire le 13 juin 2017 sur une page intitulée " Paris, la capitale des droits LGBTI " :
" Mardi 13 juin, Jean-Luc Romero, adjoint à la Maire du 12e arrondissement de Paris, chargé du Tourisme et de la Culture, a remis à Anne Hidalgo, Maire de Paris, son rapport intitulé " Paris, Ville phare de l'inclusion et de la diversité " visant à renforcer l'attractivité de Paris pour les personnes LGBTI. Ce rapport, est le fruit de plus de 60 auditions des différents acleurs concernés, qui ont permis de cibler les actions les plus pertinentes à mener. Ce rapport aboutit à 52 recommandations pour faire de Paris la Capitale mondiale des droits LGBTI (Lesbiennes, Gays, Bisexuels, Bisexuels, Trans et Intersexes) et du tourisme " LGBTI - Frendly ". "

Il existe un paragraphe nommé " Soutenir la mémoire ". On y retient qu'Anne Hidalgo souhaite faire aboutir deux projets :
    - Les archives du mouvement LGBTI - pour lequel la Ville de Paris sollicitera le soutien du Gouvernement en vue d'un archivage national.
    - La création d'un Monument en mémoire des victimes LGBTI.

Affaire à suivre...


Retrouvez toutes nos sources et l'intégralité des articles de presse
qui nous ont servi à développer ce thème sur les liens ci-dessous :

    →   www.lexpress.fr > " 120 Battements Par Minute réveille le projet de Centre d'Archives LGBT à Paris " [ article de Emilie Tôn ] publié le 3 septembre 2017 ;
    →   www.slate.fr > " S'il n'y a pas de Centre d'Archives LGBT/sida, Delanoë et Hidalgo se partageront mes cendres sur la tête " [ tribune de Didier Lestrade ] publié le 8 septembre 2017 ;
    →   www.archimag.com > " Le Conservatoire des Archives et des Mémoires LGBT lance un appel à la Mairie de Paris " [ reportage de Clémence Jost ] publié le 27 janvier 2014 ;
    →   www.medium.com > " Nous sommes nombreux à utiliser “la claque” pour décrire l’effet que nous a fait 120 Battements Par Minute. 120 Baffes Par Minute oui. " [ article de Vincent Daniel ] publié le 28 août 2017 ;
    →   www.paris.fr > " Paris, la Capitale des droits LGBTI " [ rapport de Jean-Luc Romero ] publié le 13 juin 2017.


[ Lire → L'Historique du Conservatoire des Archives et des Mémoires LGBT ]
[ au Format PDF (460 Ko) ]

 

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logo du site tetu.com 28 septembre 2017

site tetu.com
par Adrien Naselli

Actualité
Le projet d'un Centre d'archives LGBT
revient sur le devant de la scène


À Paris, il n’existe pas de Centre d’archives public dédié à la Mémoire LGBT.
Pourtant, depuis une vingtaine d’années, le projet ne cesse de renaître.
Le retentissement du film " 120 Battements Par Minute " a relancé une offensive contre les pouvoirs publics, et les débats.

San Francisco a son Musée. Berlin aussi. Montréal ses Archives Gaies du Québec. Et ainsi de suite, dans la plupart des grandes villes. Or à Paris, les livres, journaux, affiches, pancartes, rapports, manuels, photos qui ont fait l’histoire LGBT sont dispersés un peu partout, aux Archives Nationales, dans les locaux des associations, dans des collections privées, sur les étagères de parents, ami.e.s et amant.e.s.

Beaucoup d’acteurs du dossier s’accordent pour dire que le succès du film " 120 Battements Par Minute ", qui a le mérite documentaire de montrer la lutte contre le sida au début des années 1990, est un moment favorable pour remettre la pression sur les pouvoirs publics. Le dernier en date est le Groupe Écologiste de Paris, en la personne de David Belliard, qui s’adresse à Anne Hidalgo dans un courrier envoyé le 19 septembre : « Pour ce Centre des archives, nous en sommes à la troisième tentative. Notre responsabilité est grande, car ce projet ne pourra pas se relever d’un troisième échec. Le temps fait son oeuvre. »   [ Lire → Pourquoi la création du Centre d'Archives LGBT de Paris fait polémique depuis 13 ans ]

« Problème de prise en charge politique »

Contacté par TÊTU, David Belliard explique vouloir « parler directement avec la Maire pour savoir si ce sujet peut être mis en priorité à l’agenda. Notre première demande est qu’il puisse y avoir des propositions de lieu. Il y a des endroits disponibles ». Pour l’heure, seule la tenue d’un Colloque avec les associations est prévue.
« Je suis insatisfait du fait que la concertation n’aboutisse que sur un Colloque, continue Belliard. Je pense que c’est un sujet passionnant, mais je vous parle en tant qu’élu et je me dis " tout ça pour ça ". Je vais envoyer un autre courrier à la Ministre de la Culture, Françoise Nyssen, en lui demandant de prendre position. Je pense qu’il y a un problème de prise en charge politique du dossier ».

Sur ce point, tout le monde (chercheurs, associatifs, historiens et collectionneurs) s’accorde.

Mais tout le monde ne demande pas la même chose, à l’instar de l’Académie Gay et Lesbienne et son Conservatoire des Archives et des Mémoires LGBT présidée par Phan Bigotte :
« Je ne demande aucune subvention publique, je demande juste un local pour ouvrir notre fonds au public. Les archives sont déjà prêtes. À partir du moment où j’obtiens un local de la Mairie, je m’engage à ouvrir le Centre le mois suivant ».
  [ Voir → La Pétition de l'Académie Gay et Lesbienne : Demande d'un local parisien pour mettre les archives LGBT à disposition du public ]

Ancien libraire, Phan stocke depuis des années une grande quantité d’archives LGBT dans sa maison en région parisienne, où il ne peut plus mettre un pied devant l’autre.
Entre autres : 1.800 titres de périodiques LGBT, 1.200 numéros de presse généraliste, plus de 3.000 livres, 1.000 documents VHS et DVD… La liste est encore longue.
Avec l’aide de bénévoles, le tout est soigneusement consigné et renseigné sur des fiches.
  [ Lire → L'Historique du Conservatoire des Archives et des Mémoires LGBT (Format PDF : 460 Ko) ]

De droite à gauche : Phan Bigotte, Thomas Leduc (vice-président de l’association) et une universitaire américaine venue consulter le fonds.

Des sous !

Phan Bigotte se veut « réaliste » : « Il faut arrêter de réclamer de l’argent. On ne va pas fantasmer sur des subventions publiques… Il n’y a plus eu de réunion avec la Ville de Paris depuis que le candidat Socialiste, Benoit Hamon, est out de la présidentielle ».
Pour lui, ce sont des bénévoles, et personne d’autre, qui peuvent faire ce travail.

Didier Lestrade, cofondateur d’Act Up-Paris et de TÊTU, le rejoint sur ce point dans une tribune sur Slate.fr : « Nous ne voulons pas que ce Centre soit dirigé par un apparatchik du milieu du sida venant de AIDeS ou du CRIPS ou de l’Inter-LGBT. Nous ne voulons pas d’un Jean-Luc Romero qui a déjà assez de casquettes comme ça. On veut juste une personne sincère qui n’aurait pas des goûts de chiotte (ça existe) ». Mais les subventions seront nécessaires pour que le travail d’archivage et de mise à disposition du public soit effectif.

Début septembre [ 2017 ], le militant adressait un message cinglant à la Maire et à l’ancien Maire de Paris : « S’il n’y a pas de Centre d’archives LGBT / sida, Delanoë et Hidalgo se partageront mes cendres sur la tête ». Anne Hidalgo a répondu via Twitter que le projet devait « être porté à l’échelle nationale, car l’histoire du mouvement LGBT concerne la France entière ». Une manière de renvoyer la balle au Gouvernement qui ne s’est pour l’heure pas exprimé sur le sujet.


[ Lire → L'Historique du Conservatoire des Archives et des Mémoires LGBT ]
[ au Format PDF (460 Ko) ]

 

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logo du site liberation.fr 9 septembre 2017

site liberation.fr
par Aurore Coulaud

Histoire
Centre d’archives LGBT :
l'éternel projet

Évoquée depuis près de vingt ans,
la création d'un Centre d'archives LGBT n'a toujours pas abouti.
Face à la lenteur de la Mairie de Paris,
de nombreuses associations ou fonds privés se sont développés.


Que va-t-il rester des luttes LGBT ? De ces photos originales et des premières représentations iconographiques homosexuelles sur des estampes, des cartes postales de ce soldat qui en embrasse un autre, de ces marins enlacés ? Mais aussi des premiers livres sur le sujet, des revues, des disques… ? C’est pour sauver cette histoire qu’Act Up [ Paris ] a tenu une « Réunion d’Urgence » samedi au local de l’association parisienne. Objectif : remobiliser les forces autour du projet de création d’un Centre d’archives LGBT à Paris. Une trentaine de personnes – du monde associatif ou des anonymes – s'étaient rassemblées pour débattre et se coordonner avant le prochain rendez-vous, le 23 septembre [ 2017 ].

Presque vingt ans que ce projet est sur la table. Et qu’il piétine.   [ Lire → Pourquoi la création du Centre d'Archives LGBT de Paris fait polémique depuis 13 ans ]

Or la valorisation et la transmission de la mémoire gay préoccupent depuis toujours les militants LGBT. Des expositions se montent peu à peu sur le sujet. C’est le cas de « Fières Archives », consacrée à ceux qu’on appelait alors, à la fin du XIXe et jusqu’aux années 20, « les Invertis » : l’expo a réuni pour la première fois, cet été à Paris, des documents inédits de fonds privés et publics. Mais c’est surtout le film « 120 Battements Par Minute » de Robin Campillo, claque magistrale du dernier Festival de Cannes où il a décroché le Grand Prix et succès dans les salles depuis le 23 août, qui a réveillé les consciences.


Débat sur l’essence même du projet

L’idée de ce Centre d’Archives [ et de Documentation Homosexuelles de Paris (CADHP)   → Lire : Où est passé le Centre d'Archives Homosexuelles ? ], lancée en 2001 à l’arrivée de Bertrand Delanoë à la Mairie de Paris, a connu plusieurs tentatives infructueuses avant qu’Anne Hidalgo, sa successeure, ne reprenne le dossier. Malgré le vote par le Conseil de Paris d’un vœu en 2014, puis d’une subvention en 2015 ou encore du rapport sur « Paris, ville phare de l’inclusion et de la diversité » en 2017, rien n’y fait. Le projet a-t-il une chance d’aboutir ?

« La Maire y est favorable, mais ce n’est pas une priorité », déplore l’élu Vert de Paris David Belliard, qui pousse le dossier depuis 2014. En outre, Hidalgo prône désormais un projet d’envergure nationale. Une façon de botter en touche ? Faux, assure la Ville, qui compte bien « prendre ses responsabilités », selon Hélène Bidard, Adjointe à la Mairie (PCF) en charge notamment de la lutte contre les discriminations.

Pas sûr que ce genre de propos rassure Didier Lestrade, cofondateur d’Act Up [ Paris ] très mobilisé sur la question. Qui a écrit une tribune virulente publiée vendredi par Slate : « Si ce Centre d’archives n’est pas ouvert avant ma mort, ce sera Anne Hidalgo et Bertrand Delanoë qui se partageront mes cendres sur leurs têtes. Le compte à rebours commence maintenant », menace-t-il. Interrogé par Libération, Lestrade attribue le retard du projet « aux associations, au milieu gay et à certains politiques qui ont voulu tirer la couverture à eux ». Et de renchérir : « Comme pour la mémoire juive et le mouvement de la Shoah, les minorités doivent se battre. »

Sur l’essence même du projet ?, l’élue Communiste assure « ne privilégier aucune option, le travail n’étant pas assez avancé » alors que la communauté LGBT débat encore. Pour Didier Lestrade, le devoir de mémoire de l’histoire LGBT et du sida doit primer.

Thomas Dupuy n’a pas la même approche. L’ex-responsable de la Bibliothèque du Centre LGBT de Paris prône en priorité une démarche scientifique, avec le développement des « Queer Studies », comme chez les Anglo-saxons, à travers un Centre de documentation. Pour lui, « au-delà des militants, la mémoire, ça risque d’intéresser trois personnes ».


Box de stockage

La situation géographique du futur Centre prête aussi à débat. « Paris a été la ville la plus touchée par le sida et tout est déjà centralisé », argue Didier Lestrade. En attendant la tenue, avec les associations, d’un Colloque sur les archives en 2018 pour tenter de poser les fondements de ce Centre, la Mairie finance depuis fin 2016 un box de stockage de 40 m3, géré par le Centre LGBT de Paris pour « les urgences ». Associations et militants [ parisiens ] peuvent y entreposer leurs archives. Seule 20 % de la surface est occupée.

À l’heure actuelle, la mémoire LGBT est dispersée un peu partout en France. Les Archives Nationales ont commencé à recevoir des documents en 1999. Elles possèdent notamment des fonds privés issus des associations AIDeS et Act Up [ Paris ], d’avant 2014. Didier Lestrade et les proches de Cleews Vellay, ancien président d’Act Up [ Paris ] mort du sida, sont, eux, en possession d’éléments datant des débuts du mouvement.   [ Voir → Le Fonds d'archives « Cleews Vellay - Philippe Labbey » déposé au Conservatoire des Archives et des Mémoires LGBT de l'Académie Gay & Lesbienne ]

Les Archives Nationales abritent également un fonds provenant entre autres de l’association LGBT chrétienne David et Jonathan, davantage consacré aux LGBT qu’à la lutte contre le sida. Et, enfin, de petits stocks confiés par des militants eux-même. Dans ces archives, pas de livres : « C’est le rôle des bibliothèques », répond-on. Quant aux objets (tee-shirts, badges, pancartes de manifestations…), ils se trouvent au Musée des Civilisations de l’Europe et de la Méditerranée, à Marseille.

Vanessa Szollosi, des Archives Nationales, explique : « Il faut que le fonds ait un intérêt national et qu’il soit composé de documents originaux. Ensuite, il y a en interne un Comité qui étudie les propositions et évalue leur pertinence. L’idée étant de ne pas accumuler sans fin des fonds qu’on ne pourrait pas ensuite traiter et mettre à disposition des chercheurs. »


« On est là pour sauver des pans de leur vie »

C’est pourquoi bon nombre de fonds privés, de militants notamment, se sont développés.

Parmi les plus importants, celui de l’Académie Gay et Lesbienne. Cette association fondée en 2001 est gérée par Phan Bigotte. Contaminé à la fin des années 80, il s’estime être un rescapé du sida. « Je me suis dit : " Chaque jour qui passe je coûte une fortune à la Sécu " », alors cette collecte, il la fait « modestement et sans fanfaronner » pour la France.   [ Lire → Portrait de Hoàng Phan Bigotte : dans le livre des Élus Locaux Contre le Sida (ELCS) " Portraits de vi(h)es " aux éditions Cherche Midi (textes : Doan Bui ; photos : Patrick Messina) ]

Dans son pavillon de 300 m², il a entassé des archives du sol au plafond, à travers lesquelles il ne peut même plus circuler. Parmi elles, des exemplaires d’Akademos, la première revue homosexuelle fondée en 1909.   [ Lire → Le 1er numéro de AKADEMOS sur http://www.archiveshomo.info/ (mis en ligne par l'Académie Gay & Lesbienne) ]

Phan Bigotte ne demande aucune subvention, seulement qu’on lui octroie un local.   [ Signer → La Pétition de l'Académie Gay et Lesbienne : Demande d'un local parisien pour mettre les archives LGBT à disposition du public ]
« Beaucoup de gens nous contactent pour aller récupérer des documents quand il y a urgence. Un déménagement, un décès, un départ en maison de retraite, par exemple. On est là pour sauver des pans de leur vie. »

Encore aujourd’hui, la Bibliothèque du Centre LGBT de Paris reçoit des dons de particuliers : des ouvrages de fiction, de sociologie, des BD, des biographies, des revues de toutes les époques et de tous les pays et des DVD, précise Thomas Dupuy. Chaque année, « on recevait environ 300 bouquins ». Plus de 10.000 documents sont consultables gratuitement. Seules les archives du Centre (PV, courriers, documents comptables, rapports d’activité, flyers, documents internes divers) ne sont pas à la disposition du public.


Peu de lesbiennes

Michel Chomarat a, de son côté, constitué un fonds public à la Bibliothèque Municipale de Lyon en 1992. « Pendant douze ans, j’étais au cabinet [ du Maire ] Gérard Collomb et je me suis intéressé à la mémoire gay. » À la Bibliothèque, il a notamment déposé 15.000 à 30.000 documents, consultables sur place ou en ligne. « Des jeunes chercheurs viennent à Lyon pour ça », explique-t-il.

Le tout oscille entre le XVIIIe et le XXe siècle. Peu de lesbiennes sont représentées, il faut attendre 1968 pour qu’elles apparaissent. « À l’époque, les femmes montrées entre elles étaient surtout destinées aux hétérosexuels », justifie Michel Chomarat. Aujourd’hui, l’association Archives, Recherches et Cultures Lesbiennes (ARCL) se charge de collecter et d’archiver les documents ayant trait au lesbianisme ainsi qu’au féminisme.


[ Voir → La Pétition de l'Académie Gay et Lesbienne : ]
[ Demande d'un local parisien pour mettre les archives LGBT à disposition du public ]

 

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logo du site lexpress.fr 3 septembre 2017

site lexpress.fr
par Emilie Tôn

Actualité > Société
" 120 Battements Par Minute " réveille
le projet de Centre d'archives LGBT à Paris


Pour sauvegarder la mémoire [ LGBT ],
les militants réclament un Centre d'archives dans la capitale.
Une demande de longue date, qui attend toujours dans les tiroirs de la Mairie.

" Un vieux Serpent de Mer ", c'est ainsi qu'est qualifié le projet de Centre [ d'Archives ] LGBT qui n'a jamais vu le jour à Paris. Réclamé depuis plusieurs décennies par de nombreuses associations, dont Act Up [ Paris ], l'idée d'un lieu de transmission et de mémoire revient sur le tapis.

En 2002, le projet capte pourtant l'attention de la municipalité qui, sous Bertrand Delanoë, prête un local et verse 100.000 euros de subventions publiques, avant de retourner dans les cartons de la Mairie.   [ Lire → Où est passé le Centre d'Archives Homosexuelles ? ]
A plusieurs reprises, des sursauts font croire à l'ouverture imminente d'un Centre d'Archives et de Documentation Homosexuelles de Paris (CADHP), mais des conflits internes et le manque de fonds l'empêchent de naître.   [ Lire → Pourquoi la création du Centre d'archives LGBT de Paris fait polémique depuis 13 ans ]

Pourquoi serait-ce différent aujourd'hui ? " Avec la sortie de 120 Battements Par Minute (120 BPM) [ qui raconte quelques années de la lutte contre le sida, chez Act Up ], on se rend compte de l'ignorance des jeunes en ce qui concerne cette histoire ", explique Gwen Fauchois, militante et vice-présidente d'Act Up Paris dans les années 90. Elle craint aujourd'hui que cette mémoire ne disparaisse au cours des prochaines années.


" J'ai pris conscience de ce que je dois à ma communauté "

Parlant de 120 BPM, le cofondateur de l'association Didier Lestrade écrivait sur Slate l'an dernier qu'il pourrait " marquer le début d'un revival historique sur la place importante de notre pays dans la lutte contre le sida ". Il le constatait alors lui-même : " Le souvenir s'évapore chez les gays. "

Et c'est vrai. À la sortie du film, Vincent Daniel, journaliste à France Info, découvre l'histoire d'Act Up-Paris, " donc celle de la communauté sida et donc de la communauté LGBT ". " Comment pouvais-je ignorer tout ça ? " s'interroge le trentenaire dans un billet publié sur Medium. " Ce film relate des faits qui ont moins de 30 ans... Des actions qui se sont déroulées alors même que j'étais né ". Pris d'une " immense soif de connaissances ", il se met à la recherche d'archives, mais n'en trouve que des bribes, éparpillées.
Comprenant l'importance de cette histoire, qui est aussi la sienne, il veut en savoir plus. Un sentiment largement partagé autour de lui. " C'est plus qu'un film, c'est une histoire qu'on doit faire vivre ", confie-t-il à L'Express. " Personne ne m'a appris l'histoire des luttes. Aujourd'hui, je dis facilement que je suis pédé, sans que cela pose problème. Mais je me rends compte à présent qu'il y a trente ans, j'aurai été un marginal ou un fou de le faire, explique-t-il. J'ai pris conscience de ce que je dois à ma communauté. "

" Connaitre et choisir nos héritages est un acte politique ", analyse Benjamin, militant gay, qui trouve " révélateur de devoir encore expliquer l'origine de la Marche des Fiertés aux personnes qui y défilent ". " Quand la socialisation passe par la honte, l'estime de soi-même se fait par l'appropriation de cet héritage ", explique le jeune homme de 26 ans. Mais la tâche n'est pas aisée. " Toutes ces histoires sont disséminées et peu de personnes travaillent à les inscrire dans des séquences historiques et politiques. "


La plus grande collection d'archives chez un particulier

" De nombreux homosexuels sont morts pendant les années relatées par 120 BPM. Avec eux, de nombreux documents ont disparu ", raconte Gwen Fauchois, qui a enterré de nombreux proches dans les années 1990. " Même nous, qui sommes encore là, commençons à être un peu âgés. Et au fil des déménagements, les documents qu'on essaie de conserver se perdent. "

L'archivage du mouvement est une idée portée par Act Up [ Paris ] depuis ses débuts. " On gardait les tracts, les magazines, les photos, tout ce qu'on pouvait ", explique Gwen Fauchois, qui précise que l'association a envoyé de nombreux documents aux Archives Nationales.
" Ce n'est pas assez. Pour le moment, la préservation ne dépend que de petites associations et d'initiatives personnelles. "

Et pour cause. Si le MuCem de Marseille, la Bibliothèque [ Municipale ] de Lyon et le Centre LGBT de Paris mettent à disposition des archives, il n'existe pas de collection de taille à disposition du public dans la capitale.

Il y a pourtant de quoi faire.
Phan Bigotte, président de l'Académie Gay & Lesbienne, possède la plus grande collection d'archives LGBT de France.
" Elles recouvrent plus de 300m² dans mon pavillon ", raconte ce rescapé du sida, qui réclame un local pour stocker ces objets depuis 17 ans.
" Je veux redonner ce que j'ai reçu de la France pour mon traitement. Ces objets, je les ai sauvé de la benne à ordures. Je ne demande pas de subventions, seulement un local. "
  [ Lire → Conservatoire des Archives et des Mémoires LGBT : « Nous ne voulons pas d'argent, juste un local » ]


Des avancées obtenues par la lutte

" Je suis en colère contre la Mairie de Paris, le Ministère de la Culture et celui de la Santé, s'énerve Gwen Fauchois. La Municipalité pourrait engager quelqu'un pour scanner ces documents. Ce serait déjà une vraie voie d'accès vers la mémoire, accessible à tous. "
Capitale de l'hécatombe des malades du sida, la Ville " fuit sa responsabilité ", dénonce la militante.

Anne Hidalgo a exprimé à plusieurs reprises sa volonté de faire de Paris une Capitale du tourisme LGBT, ainsi que de voir aboutir le projet d'archives. Mais, interpellée par Didier Lestrade à ce sujet mercredi, la Maire renvoie la patate chaude à l'État. " Je suis prête à accompagner le Gouvernement pour avancer en ce sens avec le monde associatif et les archives publiques ", indique-t-elle dans un tweet.

" Tout le monde se renvoie la balle pendant que nous sauvons la mémoire des poubelles ", souffle Phan Bigotte.   [ Voir → L'Historique du Conservatoire des Archives et des Mémoires LGBT ( Format PDF : 460 Ko) ]

Cependant, la Mairie de Paris se défend. " Les tweets de la Maire sont très explicites sur le fait que c'est un travail collectif qui doit être mené et non un travail porté seul par la ville de Paris ", indique à l'Express son service de presse. " Personne ne renvoie la balle à personne. C'est un projet qui doit être porté à l'échelle nationale car il touche tous les citoyens français et toute la communauté LGBT, pas seulement Paris ", souligne la Municipalité. Elle précise également que la Ville continue de mener un travail en ce sens avec les associations et que le rapport " Paris, ville phare de l'inclusion et de la diversité ", demandé par la Maire à Jean-Luc Romero, " contient une recommandation qui va en ce sens ".

" La Mairie n'a qu'une vision commerciale, complètement dépolitisée, accuse quant à elle, Gwen Fauchois. Or, la mémoire est politique. Les jeunes doivent savoir que toutes ces avancées ont été obtenues par la lutte et non parce que des politiques les ont accordées. "

Benjamin confirme : " Ces histoires façonnent nos esprits, notre rapport au monde. Elles nous permettent de résister et de s'organiser face au pouvoir. " En partie relatées dans 120BPM, elles ont cette fois ému la France.

Vincent Daniel s'agace : " Les gens trouvent ça touchant, mais nous voulons surtout leur dire qu'au-delà du sentiment, nous ne pourrons bientôt plus raconter cette histoire. "


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