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Analyse Projet Centre d'Archives et de Documentation Homosexuelles de Paris APCADHP
citations à caractère critique, polémique, pédagogique et/ou scientifique des informations

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la sauvegarde des mémoires LGBTQ permet de préserver la vérité sur notre histoire

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juillet - août 2003 : Têtu N° 80, page 3 > édito de Thomas Doustaly, directeur et rédacteur en chef
http://edito.tetu.com/archives/2003-07
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Histoires de Seconde zone

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Il faut beaucoup de talent, et beaucoup de modestie véritable, pour commencer un livre par «je». Surtout quand on veut se donner le beau rôle.
On aurait aimé aimer
- le livre de Jean Le Bitoux, Citoyen de Seconde zone (Hachette Littératures),
- sous-titré Trente ans de lutte pour la reconnaissance de l’homosexualité en France (1971-2002).

Après tout, Le Bitoux fait partie des fondateurs de Gai Pied, qui, entre 1979 et 1992, date de la disparition du journal, a marqué l’histoire du mouvement gay et lesbien en France.

Par ailleurs, le récit de son expérience dans les groupes homos des années 70 et 80 allait, se disait-on, nous offrir un éclairage nouveau sur l’émergence du militantisme gay dans notre pays.

On savait Le Bitoux chroniquement hostile à tout ce à quoi il n’a pas participé depuis trois décennies dans le microcosme homo français, mais, naïvement, on s’attendait à une sorte de sagesse nouvelle chez le bonhomme, récemment remis en piste par le Maire de Paris, qui lui a confié la mission de Préfiguration du projet de Centre d’Archives et de Documentation Homosexuelles [CADHP] de la capitale.

Las… En refermant son livre, il nous faut malheureusement admettre qu’on était bien présomptueux d’espérer trouver la moindre branche à laquelle accrocher notre envie d’aimer Jean Le Bitoux.

Très vite, en effet, le lecteur est mal à l’aise, principalement à cause de la prétention du dispositif du livre qui consiste, pour l’auteur, à nous raconter sa vie en ponctuant
- chaque chapitre de son existence somme toute modeste
(à l’honneur : gros problèmes d’alcool, considérations domestiques et fins de mois difficiles…)
- de paragraphes pompeusement baptisés «Analyses historiques et sociologiques». Rédigée (pas très bien) par ses amis Hervé Chevaux et Bruno Proth, cette histoire parallèle prêterait seulement à sourire si les auteurs n’étaient pas si partisans.

Toutes les erreurs, les demi-vérités et les omissions sont acceptables dans la partie autobiographique, puisque Jean Le Bitoux est évidemment libre de raconter son parcours comme il l’entend.
- On sourit d’ailleurs en apprenant au fil des pages qu’il a eu l’idée de plein de belles choses – l’importation d’Act Up en France, par exemple –, juste avant que d’autres les réalisent.
- En lisant les passages qui se veulent historiques, on rigole moins.

Comment Proth et Chevaux peuvent-ils prétendre faire œuvre d’historiens, avec la distance et la rigueur que cela suppose, quand ils s’engagent par exemple dans une apologie sidérante de l’AFLS [Agence Française de Lutte contre le Sida] ?
- Entre 1989 et 1994, cette Agence publique de lutte contre le sida a symbolisé l’échec de la gauche au pouvoir face à l’épidémie : durant ses cinq années d’existence, le nombre des morts a augmenté de façon absolument dramatique.
- De son inefficacité coupable, de la gabegie financière qui y régnait, de sa piteuse disparition, pas un mot.
- Pourquoi ? Parce que Jean Le Bitoux était l’un de ses très nombreux experts…

Que Le Bitoux reste fier du travail qu’il y a accompli est une chose, mais la mise en perspective historique n’aurait-elle pas précisément dû servir à rappeler le contexte et l’extraordinaire hostilité qui s’exprimait contre l’AFLS ?

On pourrait multiplier les exemples.

Ce qui inquiète, c’est que cette manière de faire de son histoire l’Histoire avec un grand H semble bien refléter la direction – qu’on ose qualifier de «scientifique» – dans laquelle Jean Le Bitoux et ses amis engagent le Centre d’Archives et de Documentation Homosexuelles [CADHP] dont ils ont la charge à Paris.

Les faits, hélas, sont têtus.
-
Soit Jean Le Bitoux veut sincèrement rassembler, sans en exclure aucune, toutes les sources qui pourraient contribuer à écrire l’histoire des homos français des deux sexes et, dans ce cas, les chercheurs qui fréquenteront son Centre d’Archives montreront à quel point l’histoire racontée dans ce Citoyen de Seconde zone est partielle et partiale.
- Soit il fera de ses archives personnelles l’alpha et l’oméga de la mémoire homo, et son Centre ne rassemblera que les vieux souvenirs d’une génération de militants amers.

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octobre 2004 : magazine Têtu N° 93, page 58 > article de Luc Biecq
http://www.tetu.com/index.php?set_language=en&cccpage=anciens_numeros_2004

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Infos : France

Centre d'Archives Homos : l'erreur de casting
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ÉVOQUÉ DÈS 2001, LE PROJET DE
CENTRE D'ARCHIVES ET DE DOCUMENTATION DES HOMOSEXUALITÉS,
QUI AURAIT DÛ VOIR LE JOUR IL Y A PLUS DE DEUX ANS,
CONNAÎT DE NOUVEAUX AVATARS,
APRÈS LE LICENCIEMENT DE JEAN LE BITOUX, SON DIRECTEUR

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Le Centre d'Archives et de Documentation des Homosexualités Parisien (CADHP), dont la création a été annoncée par la Mairie de Paris en 2002, continue de faire parler de lui.

Son unique salarié, Jean Le Bitoux, figure de la communauté homosexuelle, vient en effet d'être licencié. Et on ignore encore l'état réel d'avancement du projet.
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Pourtant, l'association du CADHP, présidée depuis un an par Stéphane Martinet, avait été adoubée par la mairie de Paris, qui lui a accordé en septembre 2002 une subvention de 100 000 €.

Mais, aujourd'hui, Stéphane Martinet ne se risque pas à annoncer une date d'ouverture : "Nous sommes en phase de préfiguration. Nous publierons nos conclusions fin 2004. Je ne ferai aucune folle promesse."
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Face à lui, Phan Hoàng, ex-libraire et président de l'Académie gaie et lesbienne [Académie Gay & Lesbienne] depuis 2001, dispose de 30 000 documents, qu'il stocke chez lui. "Qu'on me donne un local, suggère-t-il. Je peux ouvrir les portes d'un centre en moins d'un mois. Quinze bénévoles travaillent avec moi, j'ai les étagères et le fonds ; j'ai juste besoin du lieu" assure-t-il.

Le président Martinet ne l'entend pas de cette oreille. Il se réjouit, au contraire, de partir de rien. "Même si je ne dis pas que rien n'a été fait", ajoute-t-il.
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Son licenciement, Jean Le Bitoux, salarié pendant deux ans, l'a demandé "contraint et forcé, parce qu'il était urgent de modifier la façon de travailler". De son propre aveu, l'ex-journaliste de Gai Pied n'était pas qualifié pour le poste qu'il occupait.

Pourquoi l'avoir compris si tard et, surtout, qu'a-t-il fait pendant deux ans ? Mystère... Interrogé par Têtu, il dit "avoir beaucoup donné". Mais, comme il attaque son ex-employeur au tribunal des prud'hommes suite à ce licenciement, il ne donne pas de détails sur son bilan.

Un jeune archiviste professionnel a été engagé récemment, mais Stéphane Martinet ne souhaite pas dévoiler son identité. "Il n'a pas de fonctions de direction, mais je vous assure qu'il a toutes les compétences requises", précise-t-il tout de même.
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L'association dispose d'un local dans le Marais et de trois lignes téléphoniques. Stéphane Martinet rêve d'archives de haute tenue, comme celles de San Francisco ou de Los Angeles.

Mais "aucun lieu en Europe ne [lui] paraît extraordinaire". Visiblement renseigné, il évoque la mauvaise conception des thésaurus dont se servent les chercheurs LGBT.

Il insiste aussi sur les conditions de conservation des documents. Aucun appel à dons n'a encore été lancé, les conditions optimales de réception et de conservation des documents n'étant pas réunies : "Il faut penser à cela dès la recherche d'un local adapté, et nous n'avons entamé aucune démarche en ce sens."
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Pour Phan Hoàng, c'est le monde à l'envers : "Comment faire un centre d'archives sans archives ?"
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ArchiQ, qui regroupe les associations Archilesb, Vigitrans et Loppataq, a dénoncé la situation dans un rapport intitulé "La fièvre des archives". Par la voix de Marie-Hélène Bourcier, ces militants rappelent la force de la mémoire vivante, qui a fait la légitimité des centres d'archives américains. "La conception administrative de l'archivage qui ne stocke que des documents écrits ne suffit pas. Il faut penser à une archive vive qui illustre les modes de vie. Pourquoi ne pas stocker des godes ?"
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Mais Stéphane Martinet n'entend pas révéler avant plusieurs mois le fruit de ses réflexions. Après avoir préfiguré, il va donc... préfigurer, tout en demandant d'autres subventions, "pour la recherche de locaux, l'appel aux dons et aux legs. Les premiers 100 000 € ne sont pas consommés, mais mon rôle est de prévoir".
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Odette Christienne, adjointe au maire de Paris chargée de la mémoire, du monde combattant et des archives, sollicitée à plusieurs reprises, n'a pas souhaité répondre aux questions de Têtu.
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Alors, quand Stéphane Martinet affirme que ses connexions dans le milieu culturel et politique servent le projet, on ne demande qu'à le croire... A la tête d'un prestigieux conseil d'administration, où l'on retrouve entre autres personnalités l'historienne Florence Tamagne et l'auteur Geneviève Pastre, le pro du réseau va aussi devoir prendre en compte la militance quotidienne.
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Car Phan Hoàng, sans titre ni prestige, entend bien transformer son incomparable collection en œuvre utile.

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décembre 2003 : Triangul'ère N° 4 (Ange et Démon - Arts & Cultures gay), page 179 > par Michael Sibalis
http://www.triangulere.com/revue4_0.htm
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Citoyen de seconde zone : Éditions Hachette
Jean Le Bitoux - Hervé Chevaux - Bruno Proth

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Il y a quatre ans, j'ai entrepris la rédaction d'une vingtaine de notices (en anglais) sur des personnages gay et lesbiens français pour le Who's Who in Contemporary Gay & Lesbian History, publié chez Routledge en 2001. Parmi ces notices, une sur Jean Le Bitoux,
- que je n'avais jamais rencontré mais dont je reconnaissais vaguement le nom : c'était pour moi le fondateur du Gai Pied, et rien d'autre.
- Après plusieurs semaines de recherches, j'ai dû reconnaître l'importance historique de l'homme, auquel j'ai fini par consacrer une notice beaucoup plus longue que prévue, qui se terminait ainsi :
" Une carrière de trente ans comme journaliste et militant politique fait de Le Bitoux une des figures emblématiques parmi les militants gais qui émergaient des luttes politiques des années 1960 et 1970 pour fonder et gérer les associations et les périodiques qui formaient une base indispensable au développement d'une communauté gaie française au cours des années 1980 et 1990. "
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Bien que racontée à la première personne, l'autobiographie d'un tel homme est forcément loin d'être un simple exercice en narcissisme. C'est, à travers la vie d'une seule personne l'histoire en abrégé d'une génération entière d'homosexuels : ses luttes pour la reconnaissance, ses victoires politiques, ses jouissances, mais aussi ses souffrances (le SIDA).

En effet, depuis que Jean Le Bitoux, jeune adolescent à Bordeaux dans les années 1960, a découvert son homosexualité et s'est rebellé contre sa famille et sa classe (la bourgeoisie), sa vie a suivi, presque inévitablement, le trajet de la révolte homosexuelle déclenchée par les événements de mai 68.
- Militant au Front Homosexuel d'Action Révolutionnaire [FHAR] (à Nice plutôt qu'à Paris) en 1972-73,
- devenu l'âme du Groupe de Libération Homosexuel Politique et Quotidien [GLH PQ] en 1975-78,
- "candidat homosexuel" aux éléctions législatives de 1978,
- directeur de publication du Gai Pied de 1979 à 1983,
- président de la Gay Pride en 1988-89,
- fondateur de la Maison des Homosexualités [MDH] (devenue par la suite le Centre Gai et Lesbien [CGL Paris] ) en 1991…

la liste de ses activités militantes et des services rendus comme journaliste à la cause homosexuelle - parfois vivement contestés, même au sein de la communauté gay - se poursuit ainsi jusqu'à aujourd'hui,
- où on le retrouve Directeur du Comité de Préfiguration du Centre d'Archives et de Documentation Homosexuelles de Paris
[AP CADHP].

En outre (même s'il ne s'y attarde pas trop et garde certains incidents pour lui-même), Le Bitoux ne passe pas sous silence les aspects plus intimes de sa vie.
- Ainsi, il raconte sans complexe comment il sombrait dans la solitude, la misère et l'alcoolisme au milieu des années 1980, découvrait ensuite sa propre séropositivité, perdait beaucoup d'amis, dont Michel Foucault, emportés par ce fléau dévastateur, mais trouvait enfin l'amour véritable (et durable) avec Émeric Papiol en 1987.
- Les belles pages émouvantes où Le Bitoux évoque de tels souvenirs, parfois joyeux, souvent terribles, sont d'une honnêté admirable.

Toute autobiographie est forcément partielle et partiale (c'est la nature même du genre) : un auteur ne peut parler que de ce qu'il a lui-même vu et vécu et par conséquent les événements sont présentés d'un point de vue très personnel.

Mais cette autobiographie est différente des autres, car en fait elle compte deux co-auteurs, l'éditeur ayant fait appel à un historien (Hervé Chevaux) et à un sociologue (Bruno Proth) pour épauler Le Bitoux dans son oeuvre de mémoire.
- Le Bitoux raconte sa vie et ses expériences, mais, au cours du récit, se trouvent intercalés de longs passages instructifs, écrits par Chevaux et Proth, qui commentent et éclaircissent les événements vécus en les plaçant dans leur contexte social et historique.
- Ces interventions, d'une érudition indubitable et très bien écrites de surcroît, sans jargon et sans prétention universitaires, font d'une simple autobiographie un vrai ouvrage d'histoire. Et elles sont loin d'être la partie la moins intéressante du livre.
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Si tout le monde peut apprécier l'ouvrage et le lire avec beaucoup de plaisir, le lecteur averti regrettera quelques petites erreurs historiques.
- Par exemple, en 1978 le candidat homosexuel dans le 18e arrondissement n'était pas Guy Hocquenghem, comme l'écrit Le Bitoux, mais Alain Sécoué (Hocquenghem n'étant que son suppléant).
- On peut déplorer aussi l'absence d'un dossier de photographies.

Et quelquefois le combattant vétéran de tant de batailles passées est devenu un peu trop conciliant :
- par exemple (mais peut être a-t-il raison ?) il évite d'évoquer le débat actuel autour du projet du Centre d'Archives [et de Documentation Homosexuelles de Paris (CADHP)]
- et refuse ainsi d'affronter et confondre les critiques dont il est la cible, voire la victime.
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À la fin du livre, Le Bitoux se demande si son histoire "est atypique ou non".
En fait, comme n'importe quelle vie,
- celle-ci est à la fois typique - car elle se déroule dans un lieu spécifique et dans une époque déterminée -
- et atypique - car chacun a sa propre personalité et suit un chemin individuel. Cette double réalité donne au livre toute sa force et tout son intérêt.

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3 7 2003 : illico N° 80, pages 10 et 11 > par Julien Grunberg
http://www.e-llico.com/content.php?section=portraits&id=35

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Jean Le Bitoux publie ses mémoires
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Le fondateur du "Gai Pied" a vécu en acteur et en témoin privilégié l’histoire homosexuelle de ces quarante dernières années.
- Un parcours qu’il raconte en l’entrelaçant avec celle des gays de cette période dans ses passionnants mémoires.
- Rencontre avec un activiste inlassable, aujourd’hui en pointe sur le Centre d’Archives Homo [Centre d’Archives et de Documentation Homosexuelles de Paris (CADHP)], à son domicile parisien.
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"Je ne voulais pas faire une autobiographie, je ne suis pas un narcissique". Jean Le Bitoux met en garde, anticipant toute critique. Comme si la prise de parole pouvait être indécente.
- Son histoire est longue, lourdement chargée. Alors il met de l’humour dans ses mots, de la légèreté dans son babil.
- Dans son appartement encombré de livres, de toiles et de souvenirs, il a "tellement l’impression de venir de la préhistoire…"

Enfant de 1948, ses premières années à Bordeaux sont marquées par la figure du père, "le commandeur", capitaine dans la Marine.
- Très jeune, il se distingue du reste de la famille par ses prises de position à gauche.
- Il est encore trop tôt pour assumer son homosexualité, qu’il vit alors dans l’isolement le plus total. "Je n’imaginais pas une seconde que mon petit secret homosexuel puisse rencontrer une révolte sociale."
- Sa rencontre avec le Front Homosexuel d’Action Révolutionnaire est déterminante : "Le FHAR m’a sauvé d’un enfermement définitif."

Le douloureux problème n’est plus tant sa sexualité qu’une "société mal foutue" qui l’empêche de vivre. C’est le temps de la libération, de l’action, et de tous les excès.
- Pendant que l’acide lui "change la tête", la révolte sociale gronde et rencontre celle de toute une génération. Jean Le Bitoux se souvient de l’euphorie de l’époque tout en refusant de parler de nostalgie.
- Il n’oublie pas son manque d’amour d’alors ni la solitude qui en découle : comme dans son livre, l’histoire intime, personnelle, n’a de cesse de croiser la grande.

Avec le GLH (Groupe de Libération Homosexuelle), en 1975, il apprend à "structurer son discours".
- Il s’agit moins de provoquer que de "communiquer" pour faire avancer les choses.
- Au détour, il s’en prend, une fois n’est pas coutume, à Act Up [Paris], sa violence, et évoque les négociations sociales que l’association finit par mettre en péril : "Il faut gueuler mais pas casser la gueule aux gens ; après, on tombe soi-même dans le piège de ce que l’on dénonce."
- Narquois, il enchaîne : "Mais ils savent déjà tout ça, mes amis d’Act Up …"

Jean Le Bitoux est intarissable. Ses digressions entre passé et présent sont à l’image de sa vie : tourbillonnantes.
- Son arrivée dans le journalisme se fera, dit-il, par la porte du hasard. Rien de plus cohérent pourtant, à en juger son désir urgent de communiquer, longtemps enfoui durant "les années de silence" de l’enfance.
- Il exulte au quotidien "Libération" (celui des débuts), où il attrape "le virus du journalisme".

La création d’un nouveau journal finit par s’imposer ce sera "Le Gai Pied", qui voit le jour en 1979.
- Le militant Jean Le Bitoux conçoit le titre avec trois objectifs en tête : "Inventer un nouveau discours, créer une discussion, même houleuse avec l’extrême gauche, essayer de séduire la gauche pour modifier les lois sociales."
- "La crise Fougeray", telle qu’il la nomme lui-même, va changer la donne quelques années plus tard. L’actuel directeur de la publication de "Illico", Jacky Fougeray, alors rédacteur en chef du "Gai Pied", révèle un point de vue divergent sur la presse gay, plus commercial que celui de Le Bitoux, ce qui longtemps opposera les deux hommes.
- Aujourd’hui, malgré leurs divergences, Le Bitoux se dit en bon terme avec Jacky Fougeray. Pour une bonne et simple raison : "Nos batailles, même si elles ont été parfois violentes, se sont passées à visage découvert".

Entre temps, l’épidémie du sida progresse, et Jean Le Bitoux découvre sa séropositivité.
- Il évoque encore la responsabilité des uns et des autres, notamment la longue période de déni par rapport à la maladie. Le sida fait peur, Le Bitoux veut informer.
- Il se lancera par la suite dans la prévention aux côtés de AIDES.

L’homme est sur tous les fronts, au cœur aussi de nombreuses polémiques.
- A ses huit années d’activité [de salarié] au sein de l’association [Aides],
- il faut aussi ajouter à son actif la création de la Gay Pride,
- ou du premier Centre Gai et Lesbien [ de Paris ( La Maison Des Homosexualités [MDH] ) ].
- Il est également président du Mémorial de la Déportation Homosexuelle [MDH],
- et participe activement à la création du Centre d’Archives [et de Documentation Homosexuelles de Paris (CADHP)], ce qui, là encore, ne lui vaut pas que des amis, un certain nombre de lesbiennes radicales contestant violemment le projet tel qu’il se précise.

Pour Jean Le Bitoux, tout cela se rejoint : des actions d’aide, de visibilité, d’accueil, et de mémoire.
- "Il faut être au milieu de la société" explique-t-il en se réjouissant de ses récentes interventions sur LCI ou dans VSD.
- Il s’insurge contre "l’image d’anti-capitaliste forcené" qu’on tend à lui prêter.
- Et rappelle que, malgré leurs différends, il a su s’associer avec l’entrepreneur David Girard pour sauver la Gay Pride au milieu des années 80, et "mettre le mouvement associatif, le mouvement commercial et les journaux ensemble".

Aujourd’hui, seule l’épidémie affecte son bilan, globalement positif. Comme il le fait remarquer, l’index est absent de son livre : "Je ne voulais pas mettre un cimetière au bout de l’histoire de ma vie. C’est pas 14 - 18 !"

L’histoire gaie a évolué, mais il y a encore des combats à mener, il le sait.
- Il évoque entre autres le suicide des jeunes homosexuels ou le rejet des vieux de la communauté.
- Jean Le Bitoux s’étonne d’avoir retrouvé "intactes" ses colères, se réjouit de l’expérience de l’écriture. Celle d’un homme, bien vivant, attelé à un seul et même projet : "la construction de l’homosexualité."

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juillet - août 2003 : Têtu N° 80, page 3 > édito de Thomas Doustaly, directeur et rédacteur en chef
http://edito.tetu.com/archives/2003-07
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Histoires de Seconde zone

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Il faut beaucoup de talent, et beaucoup de modestie véritable, pour commencer un livre par «je». Surtout quand on veut se donner le beau rôle.
On aurait aimé aimer
- le livre de Jean Le Bitoux, Citoyen de Seconde zone (Hachette Littératures),
- sous-titré Trente ans de lutte pour la reconnaissance de l’homosexualité en France (1971-2002).

Après tout, Le Bitoux fait partie des fondateurs de Gai Pied, qui, entre 1979 et 1992, date de la disparition du journal, a marqué l’histoire du mouvement gay et lesbien en France.

Par ailleurs, le récit de son expérience dans les groupes homos des années 70 et 80 allait, se disait-on, nous offrir un éclairage nouveau sur l’émergence du militantisme gay dans notre pays.

On savait Le Bitoux chroniquement hostile à tout ce à quoi il n’a pas participé depuis trois décennies dans le microcosme homo français, mais, naïvement, on s’attendait à une sorte de sagesse nouvelle chez le bonhomme, récemment remis en piste par le Maire de Paris, qui lui a confié la mission de Préfiguration du projet de Centre d’Archives et de Documentation Homosexuelles [CADHP] de la capitale.

Las… En refermant son livre, il nous faut malheureusement admettre qu’on était bien présomptueux d’espérer trouver la moindre branche à laquelle accrocher notre envie d’aimer Jean Le Bitoux.

Très vite, en effet, le lecteur est mal à l’aise, principalement à cause de la prétention du dispositif du livre qui consiste, pour l’auteur, à nous raconter sa vie en ponctuant
- chaque chapitre de son existence somme toute modeste
(à l’honneur : gros problèmes d’alcool, considérations domestiques et fins de mois difficiles…)
- de paragraphes pompeusement baptisés «Analyses historiques et sociologiques». Rédigée (pas très bien) par ses amis Hervé Chevaux et Bruno Proth, cette histoire parallèle prêterait seulement à sourire si les auteurs n’étaient pas si partisans.

Toutes les erreurs, les demi-vérités et les omissions sont acceptables dans la partie autobiographique, puisque Jean Le Bitoux est évidemment libre de raconter son parcours comme il l’entend.
- On sourit d’ailleurs en apprenant au fil des pages qu’il a eu l’idée de plein de belles choses – l’importation d’Act Up en France, par exemple –, juste avant que d’autres les réalisent.
- En lisant les passages qui se veulent historiques, on rigole moins.

Comment Proth et Chevaux peuvent-ils prétendre faire œuvre d’historiens, avec la distance et la rigueur que cela suppose, quand ils s’engagent par exemple dans une apologie sidérante de l’AFLS [Agence Française de Lutte contre le Sida] ?
- Entre 1989 et 1994, cette Agence publique de lutte contre le sida a symbolisé l’échec de la gauche au pouvoir face à l’épidémie : durant ses cinq années d’existence, le nombre des morts a augmenté de façon absolument dramatique.
- De son inefficacité coupable, de la gabegie financière qui y régnait, de sa piteuse disparition, pas un mot.
- Pourquoi ? Parce que Jean Le Bitoux était l’un de ses très nombreux experts…

Que Le Bitoux reste fier du travail qu’il y a accompli est une chose, mais la mise en perspective historique n’aurait-elle pas précisément dû servir à rappeler le contexte et l’extraordinaire hostilité qui s’exprimait contre l’AFLS ?

On pourrait multiplier les exemples.

Ce qui inquiète, c’est que cette manière de faire de son histoire l’Histoire avec un grand H semble bien refléter la direction – qu’on ose qualifier de «scientifique» – dans laquelle Jean Le Bitoux et ses amis engagent le Centre d’Archives et de Documentation Homosexuelles [CADHP] dont ils ont la charge à Paris.

Les faits, hélas, sont têtus.
-
Soit Jean Le Bitoux veut sincèrement rassembler, sans en exclure aucune, toutes les sources qui pourraient contribuer à écrire l’histoire des homos français des deux sexes et, dans ce cas, les chercheurs qui fréquenteront son Centre d’Archives montreront à quel point l’histoire racontée dans ce Citoyen de Seconde zone est partielle et partiale.
- Soit il fera de ses archives personnelles l’alpha et l’oméga de la mémoire homo, et son Centre ne rassemblera que les vieux souvenirs d’une génération de militants amers.

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26 6 au 2 7 2003 : VSD n° 1348 > par Gilles Bouley
http://www.vsd.fr/

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Etre homo en France
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Pour le fondateur du journal Gay Pied [ Gai Pied ] et pour l'historien, dévoiler son homosexualité reste difficile.

" Dénoncer quelqu'un, c'est produire une indignation sociale, toujours désastreuse " : Jean Le Bitoux.

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Co-auteurs des Citoyens de seconde zone (Hachette Littératures),
- le militant Jean Le Bitoux, créateur de la Gay Pride et du futur Centre des Archives Gays et Lesbiennes [Centre d'Archives et de Documentation Homosexuelles de Paris (CADHP)],
- et l'historien Hervé Chevaux
analysent l'évolution de la cause homosexuelle en France depuis trente ans.

[...]

VSD :
Le troisième âge, c'est encore tabou ?

Jean Le Bitoux :
Plus vous êtes âgé, plus vous êtes discriminé.
L'apologie de la jeunesse permanente en vogue dans le Marais est insupportable !

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VSD :
Une nouvelle exigence du lobby gay ?

Jean Le Bitoux :
Il n'y a qu'un seul lobby, celui des commerçants.
Et ces gens-là ne font pression que pour une chose : leur business.

[...]

26 6 2003 : L'Express pages 46 et 47 > par Marion Festraëts
http://www.lexpress.fr/info/societe/dossier/homos/dossier.asp?ida=397366

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Minorités

Les homos en panne de cause
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Autrefois fédérés par la lutte contre le sida et par le combat pour le Pacs, les gays et lesbiennes font aujourd'hui face à une société plus compréhensive. Ce qui ne les empêchera pas de marcher contre l'homophobie samedi 28 juin

Combattre l'homophobie et les discriminations : depuis quelques années, les slogans de la Marche des fiertés lesbienne, gaie, bi et trans - ex Gay Pride - qui aura lieu le 28 juin à Paris, semblent bégayer.
- Au point que, au-delà de l'indéniable aspect festif de cette manifestation, on en vient à se demander si ce défilé a encore un sens politique.
- En panne de proposition nouvelle, de projet social fédérateur depuis le vote du Pacs, en 1999, la cause homo semble aujourd'hui chercher le souffle qui l'avait portée durant les «années sida».

Le consensus mou autour de la lutte contre l'homophobie masque mal un déficit patent de revendication forte.

Au sein d'une société désormais plutôt compréhensive et tolérante,
- les élucubrations d'une Brigitte Bardot
- ou les dérapages d'une Françoise de Panafieu - «Lorsqu'on est Maire de Paris, on n'a pas vraiment sa place en tête de la Gay Pride», selon la Maire du XVIIe arrondissement -

jettent le discrédit sur leurs auteurs plus que sur leurs cibles : le député UMP Claude Goasguen s'est empressé de préciser que les propos de Françoise de Panafieu n'engageaient qu'elle.

Les homos doivent-ils faire le constat qu'ils ont peut-être, en fait, obtenu l'essentiel ?
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L'affaire a mis en émoi tout le petit monde associatif gay : le 11 avril, une poignée de militants d'Act Up [Paris] ont saccagé le siège des éditions Blanche parce que cet éditeur de littérature érotique avait publié
- Serial Fucker. Journal d'un barebacker, d'Erik Rémès.
- L'ouvrage, contestable (et contesté), décrit les tribulations d'un homo séropositif contaminant délibérément ses partenaires.

«Le règne de l'hétérosexualité»

Ce énième coup d'éclat - dit «zap» en langage «actupien» - de l'association emblématique des années 1990 a laissé plus que perplexes les militants homos.

«En faisant une telle publicité à ce livre, Act up est tombé dans le panneau,
- estime Jean Le Bitoux,
auteur de Citoyen de seconde zone Trente ans de lutte pour la reconnaissance de l'homosexualité en France (avec Hervé Chevaux et Bruno Proth, Hachette Littératures).
Rémès
écrit des choses condamnables, mais ce genre de procédé traduit l'essoufflement idéologique de cette association. On n'est plus dans l'explication sociale, on est dans la vengeance gratuite.»

Les outrances d'Act up traduisent la fin d'une époque, ces années 1980 et 1990 durant lesquelles l'union sacrée des militants homosexuels s'était accomplie au nom de la lutte contre le sida.
- «L'époque était au «nous», elle est désormais au «je», témoigne William Pettex-Sorgue, créateur et président de www.citegay.com, le plus important site homo européen - 967 000 visiteurs par mois.
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- «Le Pacs nous a donné une respectabilité, nous a sortis du cliché des gays festifs en officialisant la légitimité des couples homos», estiment Ronan Rosec et Laure Lagardère, à la tête de SOS-Homophobie, association qui publie chaque année un rapport sur les discriminations ou les insultes dont sont victimes les homosexuels.
Moins politisée qu'à ses débuts, SOS-Homophobie réclame que les actes et propos discriminants soient punis par la loi, à l'instar du racisme, et qu'une information sur l'homosexualité soit dispensée à partir du collège :
- «Il s'agit simplement de rompre l'isolement des jeunes qui se posent des questions sur leur orientation sexuelle et qui ne trouvent aucune référence positive à l'homosexualité dans leur environnement.»

Pourtant, les mentalités ont progressé, au point qu'aujourd'hui un personnage politique peut révéler son homosexualité sans choquer personne, alors qu'une telle démarche semblait inconcevable il y a dix ans.
- Selon Louis-Georges Tin, qui a dirigé le tout récent Dictionnaire de l'homophobie (PUF), la discrimination des homos va bien au-delà de la simple insulte lancée dans la rue :
- pour ce spécialiste des études gaies et lesbiennes, qui parle également de «gaiphobie», de «lesbophobie», de «biphobie» et de «transphobie», «l'origine profonde de l'homophobie est sans doute à rechercher dans l'hétérosexisme, qui est ce règne de l'hétérosexualité obligatoire [...]. En effet, ce régime tend à constituer l'hétérosexualité comme la seule expérience sexuelle légitime, possible et même pensable...»
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«Depuis le Pacs, on assiste à un immense bavardage sur tout et rien»

Débattue en long et en large par les idéologues de la communauté, la question des genres et des identités sexuelles est aujourd'hui au cœur de tous leurs différends.

«Depuis le Pacs, on assiste à un immense bavardage sur tout et rien. On devrait peut-être commencer par se pencher sur notre histoire», commente Jean Le Bitoux, chargé de piloter le futur Centre d'Archives et de Documentation Homosexuelles de Paris.

Un projet qui cristallise à nouveau les vieux antagonismes entre lesbiennes radicales et gays un brin misogynes, entre tenants du différencialisme et partisans du droit à l'indifférence.

- L'historienne féministe Marie-Jo Bonnet
- et Marie-Hélène Bourcier, théoricienne du mouvement queer
- qui étudie et remet en question les genres et les identités sexuelles -
ont d'ailleurs lancé une pétition dénonçant l'exclusion des lesbiennes du projet et la «superficialité» de la réflexion en cours.

Et les homos de s'accuser mutuellement de discrimination ...
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Ces querelles de chapelle semblent très éloignées des préoccupations quotidiennes des homos «de base».
- La sociologue Françoise Gaspard souligne d'ailleurs «la dissémination du militantisme au contact du terrain» : «Les moins de 40 ans préfèrent se retrouver dans des associations de convivialité, pour randonner, skier ou parler portugais. On voit émerger de nouvelles formes de revendication et de militantisme à travers une nuée d'associations au sein des entreprises, des institutions ou des administrations»: à La Poste, à la SNCF, dans l'armée, dans la police, au sein d'HEC ou de Sciences po, etc.
- «Nos jeunes internautes n'ont pas l'air de mal vivre leur homosexualité, remarque William Pettex-Sorgue. Eux qui n'ont pas vu mourir des dizaines d'amis, comme notre génération, s'impliquent dans des activités de loisir plutôt que dans les grands mouvements historiques.»
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Plus que le droit à la différence, la majorité des homos réclament aujourd'hui le droit à l'indifférence.

Et à l'égalité avec les couples hétéros : l'homoparentalité les motive plus que les débats autour du queer.
Ils veulent pouvoir adopter en couple et avoir accès à la procréation médicalement assistée. Et lorgnent vers l'étranger :
- en 2002, la Suède autorisait les couples du même sexe à adopter des enfants, comme aux Pays-Bas et dans certains Etats d'Amérique du Nord.
- En Grande-Bretagne, en Belgique et en Espagne, les lesbiennes ont accès à l'insémination artificielle
tandis qu'après la Belgique et les Pays-Bas, le Canada s'apprête à légaliser le mariage entre homosexuels (voir l'encadré).

«Ces revendications obéissent à une sorte d'agenda international, souligne Marie-Hélène Bourcier. Ce qui est réclamé et obtenu aux Etats-Unis ou en Australie sera réclamé et - vraisemblablement - obtenu en France

Si les homos y tiennent assez pour se mobiliser.

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mars 2003 : IBnews, pages 6 à 8 > par Patrick Rogel, directeur de la rédaction
http://www.atitud-inn.com/index.php?pid=2&rid=5&srid=25&ida=246
http://www.gayvox.com/edito/?id_rub=7&id_srub=36&id_dossier=738&idmenu=6
http://www.tassedethe.com/cadres/journal.htm

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Jean Le Bitoux défend son Centre
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La polémique a fait rage ces deux derniers mois autour du projet de Centre d'Archives et de Documentation Homosexuelles de Paris (CADHP) que ce soit
- dans la presse généraliste
(Libération, Télérama...)
- ou homosexuelle
(Illico, Têtu...).

Pour la 1ère fois, la parole est donnée au principal intéressé, Jean Le Bitoux, qui répond aux critiques formulées à son encontre.
- Il dénonce notamment «une campagne d'intoxication dont [il n'a] toujours pas compris le but».
- Il affirme avoir vécu «avec beaucoup d'amertume» cette polémique : «Les critiques étaient injustes et les chiffres avancés étaient erronés. On était entre la démagogie et la désinformation. J'en suis d'autant plus étonné qu'il y a quelques années Marie-Hélène Bourcier et Marie-Jo Bonnet avaient écrit dans des journaux que je dirigeais... Mais je ne confonds pas les lesbiennes et les lesbiennes radicales».
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IBnews a également recueilli les réactions à cette interview :
- de Phan Hoàng ([président de l']Académie Gay & Lesbienne),
- Patrick Elzière [ PDG de gayvox.com
, qui a racheté les archives du groupe de presse Gai Pied ],
- de Lionel Duroi (éditorialiste à gayvox.com),
- et de Marie-Hélène Bourcier (auteur de la pétition "Pour que cesse l'exclusion des lesbiennes du [projet de] CADHP").

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Interview exclusive de Jean Le Bitoux à IBnews
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Après avoir créé Gai Pied, vous en avez claqué la porte il y a 20 ans. Depuis, des méchantes rumeurs vous ont dit «ruiné», «isolé» et même mort ...

J’ai en effet démissionné de Gai Pied en 1983 avec une trentaine de journalistes. Cette démission m’a empêché de m’inscrire au chômage.
- S’en sont suivies des années de misère au cours desquelles j’ai également appris ma séropositivité.

- J’ai ensuite rejoint Aides puis Arcat-Sida qui m’a confié la rédaction en chef du Journal du Sida.
- Je n’ai pas pour autant cessé de militer aux cotés du mouvement homosexuel, étant de ceux qui, entre 1988 et 1998, ont reconstruit la Gay Pride Parisienne sur des bases politiques et non plus commerciales.
- Je suis également l’un des co-fondateurs du Centre Gai et Lesbien (CGL) de Paris.
- J’ai également aidé à rédiger les souvenirs de Pierre Seel, le seul Français à témoigner de sa déportation pour homosexualité.
- J’ai plus récemment fait paraître un ouvrage historique sur la déportation, ‘Les oubliés de la mémoire’ et participé à 2 dictionnaires à sortir en mai, celui de Didier Eribon et celui de Louis-Georges Tin [...].
- A la même période, je sors un ouvrage qui raconte conjointement ma longue vie militante et l’émancipation des homosexuels et des lesbiennes durant ces 30 dernières années.
Je n’ai donc pas disparu, même si régulièrement, on m’annonce mort...
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Votre projet de Centre d’Archives et de Documentation Homosexuelles (CADH) a bénéficié du vote d’une subvention de 100.000 euros par le Conseil de Paris. Etes-vous reconnaissant à Bertrand Delanoë pour cette résurrection ?

Il est vrai que nous en avons peu parlé, notamment lors des Universités d’Eté de Marseille [UEEH] ...
Mais je voulais d’abord être sûr que ce projet était sur les rails... Il a 4 axes :
- les archives pour les chercheurs;
- un large service de documentation pour les jeunes générations, les journalistes et toute personne qui souhaite se renseigner sur l’histoire de l’homosexualité en France au 20e siècle;
- également une grande bibliothèque culturelle
- et - nous l’espérons - un espace d’exploitation qui puisse servir d’auditorium.
- Enfin, un très important site Internet.
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Des voix ont critiqué le peu de place qui serait fait aux lesbiennes dans ce projet. La municipalité, au travers de Christophe Girard, a été la plus fortement attaquée, mais vous n’avez pas été épargné non plus. Comment avez-vous vécu cette polémique ?

Avec beaucoup d’amertume. Les critiques étaient injustes et les chiffres avancés étaient erronés. On était entre la démagogie et la désinformation. J’en suis d’autant plus étonné qu’il y a quelques années Marie-Hélène Bourcier et Marie-Jo Bonnet avaient écrit dans des journaux que je dirigeais...
- Mais je ne confonds pas les lesbiennes et les lesbiennes radicales.
- Nous travaillons depuis des mois avec des lesbiennes qui sont enseignantes, journalistes, photographes, historiennes, psychothérapeutes ou écrivaines disposant d’archives ou de temps à consacrer à ce projet. Elles font partie depuis le début de nos nombreux groupes de travail.
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Au-delà de cette querelle de clocher, on vous reproche une méthode: manque de concertation, absence, voire rétention d’information. Etes-vous en mesure de rassurer le public ?

Quant à notre «manque de concertation», il ne nous a pas empêché d’avoir déjà rencontré les présidentes du PASST, de la Coordination Lesbienne Nationale ou de l’association transgenre Caritig. Le contact a été positif.
Je remercie par ailleurs le soutien renouvelé de l’Hôtel de Ville [Mairie de Paris]
- ainsi que celui de l’Inter-LGBT [la Gay Pride Parisienne, ndlr]
- et les journalistes des magazines Illico et Têtu pour leur lucidité tout au long de cette campagne d’intoxication dont je n’ai toujours pas compris le but.
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Durant l’été, il y avait eu l’épisode des archives de Gai Pied, qui trouvaient un nouveau propriétaire. Ce dernier, le site gayvox.com , semble avoir été froissé que vous déclariez qu’il devrait vous les céder pour un euro symbolique ...

Je sais. C’est une regrettable erreur d’interprétation du journaliste de Têtu. C’est un article épouvantable.
- J’ai écrit immédiatement au rédacteur en chef de ce mensuel pour lui signaler les graves erreurs dont l’article était truffé.
- Comment également raconter que je n’aurais pas d’archives ? 80.000 documents attendent que je les cède au Centre.
- Sur l’histoire falsifiée de Gai Pied, mon ami historien Chevaux qui écrit un livre sur ce journal a de son côté envoyé 5 pages de rectificatifs [...]. Un très sobre erratum a été publié le mois suivant.
- Je regrette de ne pas avoir envoyé le double de ces courriers à Gayvox, qui a dû légitimement s’offusquer de cette assertion alors que nous avions eu une première rencontre des plus sympathiques, discutant ensemble de ce fonds historique.
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D’ailleurs, pourquoi cet intérêt pour des archives papier, alors que vous décrivez le portail Internet du CADHP comme un de ses «piliers» ? En ce qui concerne Gai Pied, pourquoi ne pas plutôt poursuivre l’archivage informatique, déjà bien entamé ?

Nous ne privilégions absolument pas l’un par rapport à l’autre.
- Je pense même que le site va absorber la moitié de l’énergie du Centre car il faut que, depuis chez soi, on puisse accéder aux documents essentiels de cette histoire que nous aurons pu collationner.
- Nous pensons également créer des passerelles avec les principaux sites d’archives : Berlin, Amsterdam, San Francisco, Los Angeles, Amsterdam ...
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Que pensez-vous du projet de l’Académie Gay & Lesbienne ? S’il se concrétise, ça fera 2 centres d’archives à Paris. Au moment où l’on reparle de décentralisation, pourquoi ne pas avoir proposé votre CADH à des villes en régions ?

Des échanges et des partenariats seront également - je l’espère - signés avec les archives régionales gays déjà existantes, comme à Lyon, Lille, Marseille [?] ou Rennes.
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Votre planning annonce que vous auriez déjà du dépasser la «préfiguration active» du projet [CADHP]. Quelles en sont les prochaines étapes ?

Nous allons intégrer dans les quelques semaines un local de travail pour tout le travail de préfiguration.
- Nous allons également faire l’état des lieux des dons déjà acquis, dont l’importance est telle que nous cherchons en urgence un entrepôt bénéficiant de toutes les garanties de conservation.
- Nous ferons peut-être bientôt une exposition de ces premiers dons et legs.
- Les grands axes de la bibliothèque commencent à se définir avec une commission paritaire.
- Une vingtaine d’internautes et de documentalistes étudient la logique de nos méthodologies.
- Nous poursuivons nos négociations en direction des collectivités territoriales, des dons et legs futurs, et du mécénat privé.
Car nous souhaitons un très grand Centre qui soit celui de toutes et tous et qui devrait ouvrir en 2004.

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Les réactions de :

- Patrick Elzière [ PDG de gayvox.com , qui a racheté les archives du groupe de presse Gai Pied ]
- Lionel Duroi [ éditorialiste de gayvox.com ]
- Marie-Hélène Bourcier [ pétition d'Archilesb ! > Pour que cesse l'exclusion des lesbiennes du projet de CADHP ]
- et Phan Hoàng [ président de l'Académie Gay & Lesbienne ]
réagissent aux propos de Jean Le Bitoux.

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Jean Le Bitoux nous affirme n’avoir jamais demandé que Gayvox lui cède les archives de Gai Pied pour un euro symbolique. Qu’en est-il vraiment ? Quels sont vos projets quant à ces documents ?

Patrick Elzière [ PDG de gayvox.com ] :
Lorsque nous nous sommes rencontrés fin juillet dernier, Jean Le Bitoux a demandé que Gayvox lui fasse don de ces archives papier.
Je lui ai répondu ‘pourquoi pas’ à la condition
- d’avoir la certitude que le projet tienne la route
- et n’ait pas une épée de Damoclès au-dessus de la tête;
- à savoir ne pas dépendre que d’un financement municipal pouvant être remis en cause.

Pour l’instant, je préfère qu’elles restent là où elles sont dans l’attente d’un projet abouti.
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Sur Gayvox, vous avez largement relayé la polémique en évoquant la «négation» des projets similaires. Par ailleurs, vous estimez que le CADHP résulte d’une «conjonction d’initiatives personnelles» et que son affichage associatif n’est qu’un «prétexte» ...

Lionel Duroi [ éditorialiste de gayvox.com ] :
Le document présenté à Gayvox, qui avait un certain contenu, n’est pas le même que celui qui a été soumis au financement de la Ville [de Paris].
- J’ai trouvé un peu vaseux, pour crédibiliser le projet, de gonfler la liste de soutien.
- En fait, je me suis aperçu que les projets similaires n’avaient pas été contactés.
Le CADHP - pour lequel le seul consensus vient de l’Inter-LGBT - a même fait ricaner certains en Province...
- Jean Le Bitoux, au nom de ses ouvrages, s’inscrit comme le «pape» de la mémoire gay.
- Projet élitiste, le CADHP s’appuie sur quelques personnes qui s’estiment au-dessus du panier et espère rameuter les foules ...

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Vous avez dénoncé la sous-représentation des lesbiennes dans le projet. Jean Le Bitoux reproche quant à lui la «démagogie» et la «désinformation» de «lesbiennes radicales». Qu’en pensez-vous ?

Marie-Hélène Bourcier [ pétition d'Archilesb ! > Pour que cesse l'exclusion des lesbiennes du projet de CADHP ] :
Pour ce qui est des «lesbiennes radicales», Jean Le Bitoux prouve une nouvelle fois qu’il ne connaît pas le mouvement lesbien.
- Un des problèmes du Centre - en plus d’être une coquille vide et un projet de papier - est de mettre en avant la primauté historique de l’homosexualité masculine, ce qui une erreur.
- Par ailleurs, la bonne moitié des noms des membres des Comités du CADHP sont bidons.
A propos de «démagogie», je renvoie la balle à M. Le Bitoux et lui demande d’être transparent. Qu’il cesse en particulier de refuser de se rendre sur les plateaux télé !
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Jean Le Bitoux n’a pas souhaité nous donner son avis sur l’Académie Gay & Lesbienne. A votre tour, pouvez-vous nous dire ce que vous pensez du CADHP ?

Phan Hoàng [ président de l'Académie Gay & Lesbienne ] :
Beaucoup de gens se sont sentis agressés par ce projet hégémonique de CADHP.
- C’est le fait d’affirmer que tout ce qui avait été fait avant lui était nul et non avenu qui a créé le bordel.
- Lorsque nous nous sommes créés, nous n’avons eu, par exemple, aucun problème avec le CGL de Paris, qui possède lui aussi une Bibliothèque.
C’est d’ailleurs aux petits CGL de Province que nous comptons céder une partie de nos archives.
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Illico a parlé de «lutte de pouvoir» et de «mauvaises querelles» faites au CADH. Il est vrai que si votre projet se concrétise, ça fera 2 centres d’archives à Paris ...

Phan Hoàng [ http://www.archiveshomo.info/ ] :
Le projet de l’Académie Gay & Lesbienne date de l’an 2000 : création d’un site, dépôt de la marque et [en 2001 :] dépôt des statuts.
- Soit bien avant que Bertrand Delanoë ne soit candidat à la Mairie [de Paris] et - répondant à une question de l’Inter-LGBT - ne se déclare favorable à la création d’un centre d’archives.
- Nous possédons 20.000 documents et y donnons accès.
Ce n’est pas nous qui avons copié le CADHP, avec lequel nous sommes complémentaires.

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27 4 2002 : fr.gay.com > par Olivier Monnot, rédacteur en chef
http://www.intl-fr.gay.com/index.html
http://www.monnot.net/articles.htm#lebitoux

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Interview de Jean Le Bitoux, président du
Mémorial de la Déporation Homosexuelle
[MDH]
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Jean Le Bitoux est président du Mémorial de la Déportation Homosexuelle [MDH].
- A l'occasion de la journée nationale du Souvenir de la déportation, il a accordé un entretien à Gay.com.
- Il vient de publier chez Hachette un livre sur la déportation des homosexuels, à lire absolument : "Les oubliés de la mémoire".
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Jean, pouvez-vous rappeler votre parcours militant ?
Je suis de la génération qui a eu 20 ans en mai 68.
- Le mouvement homosexuel a démarré en 1971. J'étais alors étudiant à Nice, je lisais la presse d'extrême gauche, et j'ai lu un article sur la révolte des gays et des lesbiennes à Paris.
- J'étais frustré, parce que ça se passait à Paris et que j'étais à Nice. J'ai alors fondé le FHAR (Front Homosexuel d'Action Révolutionnaire).
- Puis je suis venu sur Paris continuer le travail associatif.
- En 1975, j'ai participé aux Groupes de Libération Homosexuelle [GLH].
- Après je suis allé à Libération, et j'ai attrapé le virus du journalisme.
- En 1979, j'ai décidé de faire un grand journal homosexuel, Gai Pied, qui a tenu jusqu'en 1994, mais en 1983, j'avais claqué la porte de ce journal que je trouvais trop commercial.
- En 1985, j'ai aidé à la mise en place de l'association AIDES, je me suis occupé pas mal de prévention gay.
- Dans les années 80, j'ai rencontré un vieux monsieur, il s'appelait Pierre Seel, il m'a raconté son drame de déporté homosexuel.
- En 1989, j'ai créé le Mémorial de la déportation homosexuelle.

Un mois après la publication des travaux de la commission historique sur la déportation homosexuelle, quelles conséquences il a eu ?
Une conséquence directe : une reconnaissance plus forte de la déportation homosexuelle en France.
- On a obtenu que le triangle rose soit sur les bannières des monuments pendant la journée nationale du Souvenir, qui a lieu le 28 avril. [...]

Avec un an de recul, quel impact ont eu la déclaration de Lionel Jospin sur la déportation homosexuelle, et la présence, pour la première fois l'an dernier, du maire de Paris et d'autres élus pendant le dépôt d'une gerbe par des associations gays ?
La déclaration de Jospin, le 23 avril 2001 a mis en fureur les Fédérations de déportés, qui depuis 1976, se sont liguées contre nous, dans une homophobie de leur grand âge, et ils considèrent presque que les homosexuels dans les camps l'avaient bien mérité, puisque "ce sont des pervers". [...]

On a encore plus de mal à comprendre l'homophobie quand elle concernent des anciens déportés, et que les homophobes ont souvent eux-même été déportés...
Je ne me l'explique pas.
- On ne trie pas dans le malheur.
- Le dossier les gênait beaucoup, parce que c'était des univers entre hommes, contraints de vivre ensemble, et tous ces déportés, ont dû, bien évidemment, pratiquer pour certains d'entre eux l'homosexualité. [...]

Comment expliquer qu'il a fallu 50 ans pour que la reconnaissance commence ?
Dès 1971, j'avais lu un petit article sur les Triangles Roses.
- C'était un témoignage anonyme, qui avait été publié dans les années 60 dans la revue homosexuelle Arcadie. [...]

Comment Pierre Seel, qui était officiellement le seul déporté homosexuel français, a-t-il réagi à la publication du rapport ?
Pierre a d'abord été terrifié par le chiffre.
- On en parlait souvent tous les deux, du chiffre, et on pensait à 20, 30, ou 40 déportés homosexuels...
- On ne se rendait pas compte. Là on est sur 210 personnes uniquement pour l'Alsace. [...]

Quelles nouvelles informations sur la déportation de Pierre Seel cette liste a-t-elle donné ?
Pour Pierre, on avait déjà la trace de son arrivée dans le camp de Schirmeck.
- Après avoir été torturé pendant 10 jours par la Gestapo pour qu'il fournisse des noms, il avait été emmené dans un panier à salade de la police française dans le camp de Schirmeck, où on lui a mis une barrette bleue, celle des asociaux. [...]

Que manque-t-il encore pour que la déportation des homosexuelles soit enfin pleinement reconnue et qu'on puisse passer à un souvenir plus apaisé ?
Je crois qu'on est dans les dernières années du combat pour cette reconnaissance. On va pouvoir, enfin, clore le dossier. Dans deux ans, la commission historique aura sans doute fini ces travaux.
- On a obtenu que le Triangle Rose soit sur les bannières des monuments nationaux.
- On devrait obtenir que les homosexuels soient pleinement associés à la Journée Nationale du Souvenir de la Déportation. [...]

Votre livre est-il un aboutissement de votre travail sur la déportation ?
Oui, c'est un peu un rapport d'activité. J'ai créé le Mémorial de la Déportation Homosexuelle [MDH] en 1989.
- Je pense que je suis en train de terminer un travail que j'ai porté pas mal tout seul, parce que c'est un sujet tellement tragique que ça ne fascine pas beaucoup les militants gays. [...]

Comment jugez-vous le regard de la communauté gay sur la déportation des homosexuels, et comment votre livre va-t-il aider à mieux la connaître ?
Je pense que le livre va permettre de comprendre ce qu'est l'homophobie la plus extrême. Il y a pire que d'être insulté ou bousculé ! C'est être convoqué au commissariat et ne jamais en ressortir, être torturé pour donner la liste de ses amis homosexuels...
- Je voudrais que la communauté gay et lesbienne se rende compte que cette haine est toujours autour de nous. [...]
- Donc méfions-nous, restons vigilants. Le cauchemar peut revenir facilement. Et souvenons-nous de Berlin dans les années 30, où la situation était très semblable à la situation à Paris aujourd'hui.
- Ca n'a pas empêché Hitler, en deux mois, de fermer les lieux gays, de tabasser les homosexuels, de les convoquer, de les torturer, de brûler les bibliothèques, de dissoudre les associations, d'instaurer un couvre-feu le soir... et les homosexuels sont rentrés chez eux - quand ils n'avaient pas été raflés - en vivant dans la peur pendant toute la guerre.

Le combat pour la reconnaissance de la déportation homosexuelle, qui s'achève, est-il votre dernier combat de militant ?
Non, c'est l'avant dernier ! Le dernier, c'est la mise en place à Paris d'un Centre d'Archives et de Documentation Homosexuelle[de Paris (CADHP)] , sur lequel je travaille depuis deux ans.
- Bertrand Delanoë l'a inscrit dans ses engagements de mandature, on a commencé les négociations avec l'Hôtel de ville, les choses avancent.
- Le projet, ce serait presque de refaire un Centre Hirschfeld à Paris, et de pouvoir rassembler toute la presse homosexuelle depuis le début du siècle, tous les papiers associatifs qui nous racontent cette histoire, d'avoir une vraie bibliothèque culturelle gay et lesbienne, d'avoir un site Internet pour pouvoir accéder, sans bouger de chez soi, à des documents importants de l'histoire des homosexuels.
- On aimerait avoir un rayonnage conséquent sur la question lesbienne, qui est toujours passée à l'as, sur la question transsexuelle aussi. Il y a une culturelle transsexuelle depuis le début du XXe siècle, quand on parlait de troisième sexe...
- C'est un projet très important. On a un an et demi de phase de préfiguration, et on va peut-être fusionner avec le projet de Grand Centre Gay et Lesbien, et avec la Maison des Associations et de Services Associatifs.
- On pourrait imaginer un petit immeuble dans Paris, qui serait un Centre d'Archives et de Documentation, et aussi un Centre de Services pour les homosexuels, et les journalistes, les historiens, les chercheurs...
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Mais il faut aussi des fonds privés et conséquents pour pouvoir tenir le choc si on a des périodes sans subventions.

Sur un plan plus personnel, avez-vous dans l'idée d'écrire un livre sur votre histoire de militant, et sur ce que vous avez vécu ?
Dis donc, ça c'est de l'intuition ! Oui, exactement. J'ai attrapé le virus des bouquins.
- J'ai déjà signé pour un prochain livre où je raconte trente ans d'émancipation homosexuelle, ce que j'ai fait de ces trente années, entre 20 ans et 50 ans, comment j'ai vécu le SIDA, et les structures gays, et les querelles, et les pressions politiques, négatives ou positives.
- Je l'écris avec un historien et un sociologue qui posent, dans chaque chapitre, le contexte social et culturel de ce que je raconte. Ce sera une sorte de rapport d'activité. Il sortira dans un an.

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29 3 2001 : illico N° 26, page 12 > par JFL
http://www.e-llico.com/content.php?section=actu&id=4

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Les pédophiles, boucs émissaires des homos
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Ancien co-fondateur et rédacteur en chef de "Gai Pied", Jean Le Bitoux, observateur engagé, depuis les années 70, revient sur les rapports entre militants homos et militants pédophiles.
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L’enfant

En France, l’homosexualité vient d’une culture pédophile avec André Gide.
- En 1968, il existait même un Comité d’Action Pédérastique Révolutionnaire.
- Dans le discours du GLH à partir de 1975, il y a tout un héritage du FHAR notamment sur la question pédophile. A l’époque, il s’agissait de libérer son corps, libérer ses fantasmes. Il ne faut pas oublier qu’à cette époque-là la majorité est à 21 ans, ce qui est bien tard.

- Dans les années 70 , tout est à libérer y compris l’enfant qui est corseté comme la femme, comme l’homosexuel.

- Aujourd’hui, on ne parle plus du tout du même enfant. L’enfant des années 70 était l’esclave d’une vieille civilisation, l’enfant d’aujourd’hui est extrêmement sacralisé.
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Gai Pied

Cela ne coulait pas de source pour tout le monde.
- J’ai régulièrement été inquiet, par rapport à des articles relativement audacieux, de représailles judiciaires.
- Dans les années 70 déjà, la pédophilie est un sujet tabou. Il y avait cependant une conscience collective qu’il fallait libérer tout cela.

- René Schérer [philosophe très engagé en faveur de la pédophilie, ndlr] expliquait : pendant que tout le monde se libère, il ne faut pas oublier l’enfant.
- Je crois, concernant "Gai Pied", qu’est resté parfaitement gravé le souvenir de toutes nos adolescences homosexuelles. J’ai attendu 21 ans avant d’être majeur officiellement. Mon adolescence homosexuelle est passée à la trappe.
- Ces années ont été assez douloureuses pour pas mal de gens de ma génération. Le tabou de la pédophilie cache toute cette période où on est adolescent, où on a des désirs mais où on reste en carafe parce que rien n’est possible. C’est cela dont se souvient la génération de l’équipe "Gai Pied" à la fin des années 70.
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Duvert

Tony Duvert [écrivain très engagé en faveur de la pédophilie, ndlr] tenait une rubrique dans "Gai Pied" où il affirmait : la question pédophile existe et certains gays sont pédophobes et ils considèrent que l’émancipation des homosexuels se fera sur le dos des pédophiles.
- On a inventé un homosexuel qui laisse de côté la question pédophile.
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Le Coral

La date symbolique et funeste, c’est 1982, celle de l’affaire du Coral.
- La gauche est au pouvoir et l’extrême droite sort une affaire complètement farfelue, selon laquelle de grands intellectuels de gauche et des politiques iraient visiter régulièrement un centre pour jeunes ayant des difficultés psychologiques pour y avoir des ébats.
- Il y avait là une machination médiatico-politique qui a fait peur à tout le monde.
- L’affaire du Coral constitue un arrêt, non pas de la pédophilie, mais de la réflexion sur cette question.
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Bouc émissaire

Aujourd’hui, je pense que les pédophiles sont toujours les boucs émissaires des homosexuels.
- Le débat n’est plus du côté d’un espace de liberté que les pédophiles n’ont toujours pas mais du côté de la jeunesse des homosexuels.

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