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Réponse
publique du sénateur Bertrand Delanoë
au Questionnaire aux candidats à la Mairie de
Paris
de l'association Lesbian & Gay Pride
d'Île-de-France
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Monsieur le
président,
Je vous remercie
d'avoir pensé à m'interroger sur la question homosexuelle
à Paris. Dans cette réponse, les questions
que vous m'avez posées sont abordées successivement.
Je tiens à souligner que ce courrier vaut engagement de ma
part.
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Sur
les couples
Le pacs est
désormais en vigueur, et le concubinage inscrit dans la Loi.
Dès lors, le couple est reconnu, qu'il soit homosexuel ou
hétérosexuel, qu'il signe un pacs ou qu'il existe
simplement dans les faits. Ces éléments relativisent
l'obstruction mise à la délivrance de certificats
de vie commune par les maires de droite à Paris. Toutefois,
je rappelle que la décision de délivrer de tels certificats
relève juridiquement de la seule appréciation politique
du maire d'arrondissement. Les six mairies confiées à
la gauche à l'issue de la campagne que j'ai menée
en 1995 en délivrent depuis de nombreuses années.
L'ensemble des mairies dont la gauche aura la responsabilité
continueront.
De même,
les couples de même sexe auront accès au logement social
de la ville dans les mêmes conditions que les couples de sexes
différents, comme c'est déjà le cas dans les
arrondissements de gauche. Quant aux employés municipaux
pacsés, je proposerai qu'ils bénéficient des
mêmes avantages que les couples mariés à situation
de famille analogue. Je vous rappelle que cette mesure a été
adoptée au Conseil Régional d'Île de France
lorsqu'il est passé à gauche en 1998. Nous opérerons
de même à la Ville de Paris. Votre question porte aussi
sur le pacs en tant que texte de loi. Une commission d'information
parlementaire sur l'évaluation de l'application du pacs un
an après a été mise en place sous la responsabilité
de Jean-Pierre Michel et Patrick Bloche - votre association a déjà
été auditionnée sur ce sujet. À terme,
il appartiendra au Législateur, et pas au Maire de Paris,
de faire évoluer le pacs si cela apparaît nécessaire.
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Sur
la lutte contre la discrimination
La lutte contre
la discrimination, quel que soit son motif, est une tâche
difficile en pratique. Toute forme de discrimination est à
proscrire, qu'elle soit de nature raciste, homophobe, sexiste ou
autre. Je serai particulièrement attentif aux situations
de discrimination qui pourraient être vécues par le
personnel municipal. Si je suis alerté de telles situations,
j'agirai bien sûr pour qu'elles cessent.
Comme je l'ai
déjà exprimé publiquement, je redis mon engagement
à organiser des campagnes de lutte contre toutes les formes
de discrimination, y compris celles liées à l'orientation
sexuelle. Ces campagnes viseront la population comme le personnel
municipal, notamment lorsqu'il est en relation avec les jeunes ou
le public général.
Les personnels
d'encadrement des jeunes et les personnels de gardiennage employés
par les bailleurs sociaux doivent par ailleurs être sensibilisés,
notamment lors de leur formation initiale et continue, à
la diversité des modes de vie. La lutte contre l'homophobie
doit faire partie des objectifs pédagogiques de leurs formations.
Les projets de lutte contre la discrimination portés par
les organismes où la municipalité est représentée
seront soutenus par mes représentants (hôpitaux, CROUS,
HLM, écoles, lieux culturels ou sportifs, etc.) si je suis
élu Maire de Paris.
Enfin, nous
informerons la Commission Départementale d'Accès à
la Citoyenneté (CODAC) de toute affaire qui relève
de ses compétences. Réciproquement, nous instruirons
les affaires suivies par la CODAC qui concerneraient les services
municipaux.
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Sur
les familles
Le Conseil de
Paris, réuni en Conseil Général, s'exprime
sur l'agrément relatif à l'adoption. J'entends fonder
les décisions en cette matière sur les mêmes
principes qui guident toute notre action politique : le respect
de la loi, et le respect des personnes.
Les revendications
qui relèvent de la loi ne sont pas du ressort du Maire de
Paris, mais du Gouvernement et du Parlement. Je respecterai donc
la loi en vigueur, tout en veillant à respecter les personnes,
donc à mener une politique non-discriminatoire.
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Sur
les situations de grande précarité
Il arrive encore
aujourd'hui que des jeunes soient violemment rejetés par
leurs parents lors de la découverte de leur homosexualité.
Face à ces situations critiques, qui conduisent parfois à
la prostitution, des appartements seront temporairement mis à
disposition pour diminuer le risque d'échec scolaire et d'exclusion.
Ceci s'accompagnera d'un soutien adapté psychosocial, mais
aussi juridique, assuré par des professionnels spécialement
formés.
Il en va de
même pour le financement d'un lieu de ressource pour les personnes
prostituées, à l'instar de Subway à Berlin.
Ce lieu, qui doit être non-mixte pour atteindre ses objectifs,
permettra aux usagers de prendre une douche, de trouver un lit,
d'accéder à une consultation médicale, juridique,
et surtout de pouvoir avoir un rapport socialisé avec les
personnes du centre et les autres usagers.
Par ailleurs,
la question du suicide des jeunes ne peut pas laisser indifférent
lorsqu'on voit les statistiques. Vous m'interrogez sur les suicides
qui seraient liés au rejet social de l'homosexualité.
La mise en oeuvre de notre programme de lutte contre les discriminations
devrait apporter une contribution à la lutte contre ce phénomène.
Pour aller plus loin, il me semble nécessaire de faire des
études sociologiques solides sur cette question afin de pouvoir
adapter les politiques publiques.
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Sur
les associations
Le
rapport entretenu avec les associations par l'équipe municipale
sortante est anormal : manque de transparence, absence de concertation,
soutien à des associations dont le rapport avec la vie des
Parisiens est douteux.
Les
associations homosexuelles connaissent bien cette situation, car
elles ont été toujours purement et simplement ignorées.
Nous avons rendu
publique une charte pour nous engager sur un nouveau partenariat
avec les associations de Paris, vous la trouverez ci-jointe. Elle
préconise la mise en place d'un partenariat entre la nouvelle
municipalité et les associations, fondé sur le respect
de l'identité et de l'indépendance de chacun, sur
la transparence et la confiance réciproques. Nous voulons
travailler avec les associations en les consultant après
les avoir informées, car la concertation est la clé
de l'exigence démocratique. Nous créerons une Maison
des associations dans chaque arrondissement, accessible à
toutes les associations.
Pour
ce qui concerne plus spécifiquement les associations homosexuelles,
l'équipe municipale sortante n'a jamais perçu
la nécessité de les soutenir et les a toujours traitées
comme des pestiférées. Ainsi, aucun projet associatif
homosexuel n'a obtenu la moindre subvention sociale ou culturelle
de la Mairie, alors que le budget associatif de la ville
s'élève à plus de un milliard de francs.
Ces
rapports de défiance doivent cesser à l'heure où
plus personne ne conteste aujourd'hui l'importance et la nécessité
des associations homosexuelles, qui permettent d'associer lien social
et prévention en remplissant un rôle d'accueil, d'information,
d'écoute, et de socialisation.
Je
m'engage à donner aux associations homosexuelles un accès
équitable aux équipements municipaux, aux subventions,
aux parrainages, aux baux sociaux, à l'information et à
la publication dans les documents municipaux.
- Cet accès sera évalué en fonction de leurs
besoins et projets, comme pour toutes les associations, avec des
modes opératoires communs et transparents pour définir
et évaluer les objectifs et les subventions.
- Des financements pluriannuels seront mis en place.
- Enfin, il est évident, dans mon esprit, que les activités
associatives qui ne relèvent pas de la prévention
du sida seront soutenues dans le respect de leur véritable
objet (action sociale, jeunes, sport, culture, etc.).
L'opprobre
jetée par les décideurs publics préfigure et
légitime souvent la discrimination, à tous les niveaux.
Je combattrai l'une et l'autre pour les faire cesser à
la Mairie de Paris.
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Sur
la lutte contre le sida
Paris est la
grande ville européenne la plus touchée par le sida.
Je considère que la municipalité doit mettre en oeuvre
une politique énergique de prévention et d'aide aux
personnes atteintes. Notre politique se décline en trois
volets essentiels : la prévention, le logement, l'emploi,
étant entendu que des soins de qualité doivent être
assurés pour tous. Des messages de prévention seront
régulièrement diffusés, y compris en direction
de populations spécifiques (personnes migrantes, homosexuels,
toxicomanes, jeunes, etc.).
En outre, se
soigner convenablement est impossible quand on vit dans la rue,
dans un logement précaire ou insalubre. Nous mettrons en
place une commission chargée de définir des critères
justes et transparents d'attribution des logements sociaux aux personnes
malades et de veiller à leur application. Tout sera fait
pour assurer le maintien à domicile des personnes malades
: aides à domicile, recours au Fonds Social du Logement pour
éviter les expulsions, création d'une allocation spécifique
de maintien à domicile quand les dispositifs classiques ne
suffisent plus.
Enfin, la Ville
renforcera son implication pour favoriser l'emploi des personnes
malades en augmentant le financement des associations compétentes
et en s'engageant elle-même à offrir de réelles
possibilités d'embauche et de carrière dans l'ensemble
des services dont elle a la responsabilité.
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Sur
la mémoire
La
collectivité se doit de nourrir la Mémoire, ferment
de l'intelligence et du discernement dans notre approche des nouveaux
problèmes.
Je tiens à vous réaffirmer mon attachement à
ce que l'étude de la déportation des personnes homosexuelles
pendant la seconde guerre mondiale établisse enfin la vérité.
Les cérémonies de souvenir de la déportation
ne sont pas organisées sous la responsabilité du Maire
de Paris, mais de l'État et des associations d'anciens déportés
et combattants. Concernant la participation des associations aux
préparatifs, je ne peux que m'engager à sensibiliser
le Ministre à leurs demandes répétées
chaque année.
Au-delà
de la mémoire de la déportation, le
mouvement homosexuel français a toujours été
fragile lorsqu'il s'est agi, depuis cinquante ans, de conserver
et transmettre son histoire : écrits, témoignages,
presse, revues, photos, etc.
C'est
pourquoi la possibilité de créer un lieu de documentation,
d'information et de recherches autour de cette mémoire a
retenu toute mon attention.
Ce
lieu serait organisé autour des fonctions d'accueil, de documentation
(bibliothèque, vidéothèque, point internet
et centre de presse), d'exposition et d'archivage.
L'amnésie
fait le lit de l'intolérance et du rejet. La ville de
Paris, témoin de tant de pages d'Histoire, se
doit de cultiver sa mémoire.
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Pour finir,
je vous remercie de m'indiquer que la prochaine marche de
la Lesbian & Gay Pride aura lieu le 23 juin 2001. J'ai
pris part à la manifestation depuis de nombreuses années,
bien avant que la foule soit au rendez-vous ou que la campagne ait
commencé. Je continuerai à soutenir la marche et à
y venir à l'avenir, que je sois Maire de Paris ou non.
J'ai le plaisir
de vous adresser divers documents qui reprennent mes propositions.
Ils compléteront ma réponse sur l'ensemble des points
abordés ou non dans ce courrier.
Je vous prie
de recevoir, Monsieur le Président, [...]
Bertrand
Delanoë
Pièces
jointes :
- Dialoguer avec les parisiennes et les parisiens
- Contrat de l'alternance
- Charte pour un partenariat avec le monde associatif
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